Métropolite Ioann (Snytchev). Russie

Portrait par Philippe Moskovitine

Portrait

Dans le texte ci-après, l’Archiprêtre Guennadi Belovolov relate un événement qu’il vécut avec le Métropolite Ioann (Snytchev), en mai 1993 . Ce récit fut publié pour la première fois le 1er novembre 2005, dans une publication du Podvorié de Leouchino, à Saint-Pétersbourg, dont le Père Guennadi (déjà connu à travers plusieurs traductions sur le présent blog, disponibles ici) fut recteur. Le texte est repris à la page 542 du livre «Il était un homme envoyé par Dieu», publié en 2015 par les éditions Tsarskoe Delo à Saint-Pétersbourg.

«Un jour, Vladika Ioann devait intervenir à la Maison du Cinéma… Celle-ci accueillait la première projection d’un film orthodoxe, et je devais également intervenir au cours de la soirée.
Sachant que Vladika serait présent, j’arrivai en avance afin de l’accueillir. Mais malgré que je sois arrivé trente minutes en avance, je fus surpris de voir que Vladika se trouvait déjà dans une sale de réunion de l’administration. Il m’invita à sa table et nous discutâmes du contenu de nos interventions respectives, et de l’ordre dans lequel nous allions intervenir.
Vladika avait l’air un peu souffrant, et tout naturellement, je lui demandai : «Vladika, comment va votre santé?» Il se figea soudain. Une pause eut lieu. Presque une minute. Il me sembla qu’il n’avait pas même entendu ma question. Je pensai : peut-être devrais-je répéter la question, mais est-ce convenable ?
Et soudain, Vladika dit : «Oui, ma santé, … et alors? L’essentiel, c’est tout de même la santé de la Russie».
J’avoue avoir été abasourdi par pareille réponse. La question, somme toute assez générale de ma part, avait engendré une réponse tellement profonde, complètement dépourvue de formalisme et d’étiquette. Et je sentis que pour Vladika, il en allait réellement ainsi, l’essentiel, c’était la santé de son pays, de son peuple, la santé de la Russie. Et lui, s’il était malade, c’était de la maladie et des misères de la Russie. Pour lui le concept d’une vie personnelle détachée de la vie de son troupeau, de son peuple, n’existait pas. Et s’il était Métropolite de Saint-Pétersbourg, on aurait pu l’appeler, en vérité, le pasteur de Toute la Russie.
Traduit du russe

Le Métropolite Ioann, Saint Philarète de Moscou et Saint Mitrophane de Voronège

Écrits

Le Métropolite Ioann commença à rédiger au cours des années 1960′ une monumentale monographie du Saint Métropolite Philarète (Drozdov) de Moscou, intitulée «Vie et activités du Métropolite Philarète» («Жизнь и деятельность митрополита Филарета»), publiée pour la première fois en 1994 par les éditions «Russkii Leksikon» à Toula. Pour la présente traduction, on s’est référé au texte publié en 1997 par les éditions «Samara Orthodoxe». Cette œuvre du Métropolite Ioann demeure une référence en la matière, et elle fut un des éléments qui alimenta son amitié fraternelle et étroite avec Sa Sainteté le Patriarche Alexis II de bienheureuse mémoire, ce dernier ayant rédigé une thèse de fin de premier cycle à l’Académie, intitulée «Le Métropolite Philarète sous son aspect de dogmatiste». Les deux textes ci-dessous, (extraits des pages 348-349 et 368-369 de l’édition de 1997) lèvent le voile sur l’activité d’historien de l’Église du Métropolite Ioann. Ils n’ont à ce jour pas été traduits en français. Leur aspect apparemment anecdotique ne dissimule pas la fidélité de Saint Philarète aux dogmes de l’Église face aux sollicitations du pouvoir impérial lorsque celles-ci s’opposaient à sa conscience orthodoxe, ni son obéissance toute monastique. Comme on le lira, ces attitudes caractérisèrent également le Saint Évêque Mitrophane de Voronège, qui vécut au XVIIe siècle, et elles furent d’ailleurs aussi des traits de caractère saillants du Métropolite Ioann, auteur du texte.

En mémoire de l’époque inoubliable d’Alexandre Ier, et en mémoire de la calamité endurée par la Patrie , récompensée par la victoire, la gloire et le relèvement de Moscou, l’Empereur Nicolas Ier décida d’ériger dans la vieille capitale un portail triomphal. L’idée du monarque reçut le plein assentiment du Métropolite de Moscou. Le 17 août 1829, Philarète se rendit, accompagné de son clergé, sur les lieux où allait être érigé le monument, et y célébra un molieben solennel sur les fondations de celui-ci. Et il prononça ensuite une homélie remarquable quant à la signification du portail pour les générations à venir. «Ce monument, souligna-t-il, est une prédication silencieuse, qui d’une certaine façon peut être supérieure aux prédications que l’on prononce, car elle ne s’interrompt jamais, et ainsi, elle finit par pénétrer jusqu’au cœur du peuple et de toutes les générations à venir. Le monument est un livre qu’il n’est pas nécessaire de rechercher dans les bibliothèques, car il se dresse sur la route, et le liront ceux-là même qui ne pensaient pas le découvrir». Read more

Saint Jean de Kronstadt, le Métropolite Ioann (Snytchev) et le Tsar Pacificateur

Éléments biographiques

L’original russe du texte ci-dessous, rédigé par Sergeï Igorievitch Astakhov, Directeur Général des Éditions Tsarskoe Delo à Saint-Pétersbourg, a été publié pour la première fois dans le livre «Il y eut un homme, envoyé par Dieu», (Был человек от Бога…) (Vie du Métropolite Ioann (Snytchev)de Saint-Pétersbourg et Ladoga), édité pour la première fois 2005 et réédité en 2015. Dans cette deuxième édition, le texte se trouve aux pages 694 et 695.

La Providence Divine jugea bon, pour des raisons qui nous sont cachées et resteront jusqu’à la fin inexplicables à nos yeux, que Vladika Ioann quittât le monde terrestre le jour anniversaire du décès du Souverain Empereur Alexandre III.
C’est précisément le 20 octobre (2 novembre selon le ‘nouveau calendrier’) 1894, que décéda à Livadi le Tsar Pacificateur, dans la cinquantième année de sa vie, après avoir reçu de Saint Jean de Kronstadt, le Bon Pasteur de Toute la Russie, la bénédiction qui l’accompagna sur son dernier chemin .
Le Métropolite Ioann vénérait profondément la mémoire du défunt Souverain, et exactement un an avant sa mort, le 2 novembre 1994, il célébra solennellement une pannychide pour l’Empereur Alexandre III qui reposait en Dieu, devant sa tombe, à l’intérieur de la Cathédrale des Saints Apôtres Pierre et Paul à Saint-Pétersbourg. Ce jour-là, c’était la première fois depuis 1917 qu’un hiérarque priait sous les voûtes de la Cathédrale des Saints Pierre et Paul pour le repos de l’âme de tous les membres de la lignée régnante de la Maison Romanov. Vladika prit en outre les dispositions nécessaires afin que soit arrêtée la liste des noms des personnes à commémorer et pour que celles-ci le soient dans toutes les églises de Saint-Pétersbourg le jour anniversaire de leur décès.
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Métropolite Ioann (Snytchev). Ce que lui coûta son intransigeance.

Éléments biographiques

Le texte ci-dessous est dû à l’actuel Métropolite Nikon d’Oufa et de Sterlitamak. En 1983, il fut ordonné diacre et ensuite prêtre par Vladika Ioann, qui était à l’époque archevêque de Kouibychev et Syzran (Actuellement, Samara). La première publication du texte eut lieu dans le N°29-32 du journal «Radonège.Revue Orthodoxe», en 1996. Il a ensuite été repris aux pages 546 et 547 du livre «Il était un homme envoyé par Dieu…» (Il n’en existe pas de traduction en français), dont l’édition utilisée ici date de 2015. Ce bref témoignage résume la position du Métropolite Ioann (Snytchev) vis-à-vis des gens «du pouvoir», et le prix qu’il eut à payer pour cela. L’exemple précis avec lequel le texte débute illustre la période post-communiste de 1990-1995, mais la posture s’applique à toutes les périodes de la vie de Vladika Ioann, comme on peut le lire dans l’ouvrage précité.

«Évidemment, les autorités de la ville, et à leur tête, le maire Anatoli Sobtchak, le détestaient. Les appels à la pureté spirituelle, à la vie en Christ, que Vladika adressait à tous non seulement leur paraissaient étranges, mais les gênaient, et ils les voyaient comme des accusations. Et la position patriotique qu’adoptait le Métropolite allait à l’encontre de toutes les activités de ces hauts-fonctionnaires. Il ne caressait pas les puissants dans le sens du poil. Leurs rapports avec le Métropolite devinrent ouvertement hostiles, bien souvent jusqu’à la mesquinerie.
D’Occident et d’Orient déferlaient les prédicateurs de sectes de toutes sortes, et en échange de dollars, toutes les portes s’ouvraient devant eux. Vladika ne pouvait s’accommoder de cela. Et de nouveau conflits émergèrent. Sa ténacité et sa fermeté suscitèrent inévitablement des affrontements avec les autorités.
Le résultat de ces luttes harassantes fut le décès prématuré de Vladika1.
Mais en dépit de son intransigeance dans ses relations avec les hommes de pouvoir, Vladika se distinguait, dans les relations personnelles, par une remarquable humilité. Il vivait dans une humilité totale. Il n’aimait pas les galas et réceptions; il les fuyait. Sa vie était une vie pour Dieu et pour le troupeau qui lui avait été confié.»
Traduit du russe

Vladika était un starets

Portrait par Philippe Moskovitine

Portrait

Le soir du 20 octobre/02 novembre 1995, vers 20h 30 le Métropolite Ioann de Saint-Pétersbourg et Ladoga décédait subitement d’un infarctus, à l’âge de 68 ans, dans un des vestibules de l’Hôtel Septentrional, sur l’Île Petrogradski, à Saint-Pétersbourg, s’y étant rendu par obligation, afin y rencontrer, pour défendre les intérêts de l’Église, le maire de la ville, qui avait refusé de le recevoir pendant deux ans. Nous célébrons donc le vingt-quatrième anniversaire de la natalice du saint Vladika Ioann dont de nombreux Russes attendent la glorification officielle. Le texte ci-dessous a été publié le premier novembre 2017 sur le site Russkaia Narodnaia Linia. Il s’agit de souvenirs de l’Archimandrite Pacôme (Tregoulov), ‘assistant’ de Vladika Ioann et Supérieur du Monastère de la Sainte-Trinité de Zelenets, situé à une centaine de kilomètres à l’Est de Saint-Pétersbourg.

Vladika reçut de Dieu le don de simplicité. Celle-ci se manifestait en tout, dans son mode de vie, dans sa nourriture, dans ses relations, qui jamais ne firent place à la familiarité, avec qui que ce fût. Il était en effet archevêque. Sa résidence de Métropolite ressemblait à un musée, mais Vladika ne s’en rendait pas compte du tout, se sentant à l’aise dans tous les environnements. Il y avait emmené son ancien lit métallique. Il vivait modestement. Ni son transfert dans l’ancienne capitale, ni son ordination épiscopale ne se reflétaient en son comportement. Il avait toujours été un homme simple et il le demeurait, tout en répondant aux exigences élevées du rang de métropolite, en ayant la main ferme que requiert la direction d’une éparchie. Il ne craignait rien ni personne. Il prenait ses décisions en fonction des canons et de la pieuse Tradition de l’Église. Read more

Métropolite Barsanuphe : Vladika Ioann était un homme lumineux.

Portrait par Philippe Moskovitine

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Depuis de nombreuses années, à dates régulières, le site Ruskline propose des articles, souvenirs et réflexions au sujet du Métropolite Ioann (Snytchev). Ce fut le cas en octobre 2017. Le 9 octobre 2017, le Métropolite Ioann de bienheureuse mémoire aurait atteint l’âge de 90 ans. La série d’articles proposée à cette occasion s’intitulait : «Vladika Ioann, tel qu’il fut…». Dans le texte ci-dessous, le Métropolite Barsanuphe (Soudakov), qui dirige aujourd’hui encore l’Éparchie de Saint-Pétersbourg et Ladoga, partage ses réflexions et souvenirs. Le texte fut mis en ligne le 3 octobre 2017.

C’est au Monastère de Pioukhtitsa que je fis la connaissance du Métropolite Ioann. J’étais alors étudiant à l’Académie de Théologie de Moscou et moine de la Laure de la Trinité-Saint-Serge. Je séjournais à Pioukhtitsa pendant les vacances d’été lorsque Vladika Ioann y vint, accompagné de nombreux collaborateurs. Je me souviens de ce que nous avons célébré ensemble au monastère, en l’église de la Dormition. Je me souviens qu’il prononça pour les sœurs une superbe homélie, dans le réfectoire. Il y enseigna les vertus monastiques : humilité, obéissance et prière. Tout le monde l’écoutait comme on écoute un starets, en retenant son souffle. Chaque mot de Vladika allait droit au cœur de toutes les moniales et de tous les moines présents. Read more