L’arbre du Juste Lot

 

L’Archimandrite Naum (Baiborodine)

Le texte suivant est la traduction des pages 51 à 56 du livre de l’Archimandrite de bienheureuse mémoire Naum (Baïborodine), starets de la Laure de la Trinité-Saint Serge, intitulé «Le Chemin du Repentir» (Путь покаяния) dans son édition de 2019, édité à Moscou par les Éditions Sibirskaia Blagozvonnitsa. Le saint Père Naum était doté, en plus de charismes accordés par Dieu, de connaissances encyclopédiques. Ce texte montre comment sont reliés des événements de trois époques éloignées les unes des autres et illustre ainsi la continuité entre l’Ancien et le Nouveau Testament, la continuité de l’Histoire Sainte sous la Providence de Dieu.

Pas loin de Jérusalem se trouve la Mer Morte, dont la salinité est telle que pas un seul poisson ne peut y vivre. Elle s’est formée sur l’emplacement des antiques villes de Sodome et Gomorrhe, où vécurent des gens pervers qui refusaient de se repentir. Le Seigneur punit ces villes par le feu et elle disparurent de la surface de la terre. Mais, sa femme et leurs deux filles vivaient une vie juste. L’Esprit Saint leur ordonna de sortir de la ville qui devait être détruite. Ainsi, ils eurent la vie sauve.
Toutefois, plus tard, Lot, tomba et commit un lourd péché : dans son ivresse, il connut ses deux filles comme si elles étaient, successivement, sa femme. Quand plus tard il reprit ses sens, cela le mit hors de lui et il pleura amèrement. Il se rendit auprès du patriarche Abraham, son oncle, et il lui raconta tout ce qui s’était passé. Abraham lui répondit : «Tu as commis un grand péché. Je vais prier Dieu. Il me parlera». Abraham était un tel juste qu’il pouvait appeler Dieu et Dieu lui répondait ; il s’entretenait alors avec Dieu. Il revint et dit : «En guise de repentir tu feras ce que je vais te dire». Abraham prit trois branches desséchées, une d’un cyprès, une d’un cèdre et une d’un pin. Il les serra fortement l’une contre l’autre, planta le tout en terre et continua à transmettre le commandement de Dieu : «Voilà ce que tu feras en guise de repentir : va jusqu’au Jourdain, à trente kilomètres. Puises-y de l’eau et revient en arroser ces trois branches sèches, ces trois baguettes mortes, jusqu’à ce qu’elles reverdissent, jusqu’à ce qu’elles commencent à pousser ici».
Quelle foi fut nécessaire à Lot, quelle espérance, quel labeur, pour que reverdissent des baguettes sèches et sans vie, pour qu’elles fleurissent et qu’un arbre pousse à partir d’elles. Et il alla au Jourdain pendant trente ans avec une mule, remplissant une grande jarre d’eau et revenant arroser le triple plant.
Le Monastère de la Croix se trouve dans un faubourg de Jérusalem. On y montre justement l’endroit où poussa cet arbre. Il fut préservé, car c’est de cet arbre que fut façonnée la Croix sur laquelle fut crucifié le Sauveur du monde.
Que ne dut-il pas endurer, Lot! La chaleur torride de Palestine, la distance de trente kilomètres à parcourir, et les embûches que le diable ne manqua pas de monter. Il prit un jour la forme d’un vieillard et il arrêta Lot sur son chemin de retour. Il lui dit : «Homme de Dieu, donne-moi à boire, je meurs, tu en répondras devant Dieu!» Et il se lamenta jusqu’à ce que Lot cédât et lui donnât la grande cruche. Le vieillard but à la cruche et ensuite vida se qui restait. Lot hocha la tête et s’en retourna vers le Jourdain, chercher de l’eau.
Et un jour, la joie de Lot fut grande ! Les trois branches s’étaient unies et poussaient en un seul tronc, grand et beau, qui se divisait en trois cimes.
Quand le Roi Salomon décida de construire le temple à Jérusalem, sur le Mont Moriah, il donna pour instruction d’y amener tous les beaux et grands arbres pour la construction. On en amena même par la mer, les nombreux cèdres du Mont Liban. L’arbre de Lot fut abattu et amené lui-aussi. Mais les constructeurs ne parvinrent pas à en faire usage. Pour les uns, il se faisait démesurément gros, pour les autres,il s’amincissait et pour d’autres encore, il s’écourtait. Ils cognèrent tant et plus et finirent par dire : c’est l’arbre de Lot, l’arbre du péché. Et ils le rejetèrent. Il gît pendant presque un millénaire dans la piscine de Siloam. Et lorsque le Sanhédrin eut décidé de la manière dont il fallait punir Jésus-Christ, l’Homme qui s’était «fait égal à Dieu» (J.5;18), ils se rappelèrent l’existence de l’arbre de Lot, l’arbre du péché, et il l’utilisèrent pour en fabriquer la Croix. L’ancienne prophétie s’accomplit, et de l’arbre à la triple origine fut faite la Croix, et sur ce bois, le Christ fut crucifié, expiant nos péchés, et il vainquit la mort et nous donna la résurrection.
Traduit du russe.
Source :

Le crâne de Saint Serge et le Starets Hilarion

La traduction ci-dessous est celle d’un extrait des pages 139 à 143 du livre «Un Ange terrestre et un homme céleste. L’Archimandrite Naum (Baïborodine) parle de Saint serge de Radonège» (Земной ангел и небесный человек. О преподобном Сергии Радонежском), publié à Moscou en 2018 aux Éditions Sibirskaia Blagozvonnitsa. Il s’agit plus précisément d’un extrait de l’homélie que le Starets Naum de bienheureuse mémoire prononça le 11 octobre 2009, à l’occasion de la commémoration des Saints Cyrille et Marie, les parents de Saint Serge.

(…) En 1920 arrivèrent de Moscou des dispositions visant à la liquidation des reliques. Mais il se trouva des gens pieux qui empêchèrent cela. On ôta alors le crâne de Saint Serge de Radonège et on le remplaça par la tête du Prince Troubetskoï. Un fidèle habitant la ville prit sous sa protection le reste des reliques. Les autorités se présentèrent et procédèrent à la liquidation; ils emportèrent tout ce qu’ils avaient trouvé. Vladika Serge (Goloubtsov) a été inhumé chez nous à la Laure. Il fut alors partisan de la dissimilation, afin de la préserver dans le plus grand secret, de la tête de Saint Serge. Tous ceux qui en furent informés durent prêter serment, afin que personne ne révèle jamais où elle se trouvait. Read more

Matouchka Eupraxie. Le miracle des cafards et des chenilles.

Le texte ci-dessous est la traduction d’un extrait du livre «Nous allons te donner du souffle» (Дарим Тебе дыхание), écrit par Mère Eupraxie (Inber), Higoumène du Monastère de l’Ascension, à Orcha dans Éparchie de Tver et Kachine. Le livre est paru en 2019, aux éditions Sibirskaia Blagozvonnitsa.
Ekaterina (son prénom civil) Inber fut une fille spirituelle du Starets Naum (Baiborodine ; 1927-2017) de bienheureuse mémoire. C’est celui-ci qui éduqua spirituellement celle qui était alors une jeune intellectuelle d’une vingtaine d’années, convertie à l’Orthodoxie vers la fin des années ’70 «parce que cela se faisait». Elle reçut la tonsure monastique en 1992. Le Starets Naum envoyait la jeune femme apprendre les fondements de l’Orthodoxie, et du monachisme, dans des endroits divers et parfois éloignés, chez des clercs et des moines de ses connaissances. Ce sont ces expériences que conte le livre de Mère Eupraxie. Dans le récit ci-dessous, extrait des pages 108 à 112 du livre, l’Higoumène Eupraxie narre un événement qu’elle vécut dans l’isba occupée par le Hiéromoine Alexis, prêtre du village de Serbilovo, et par le novice Moïse, auxquels il arrivait d’accueillir chez eux l’un ou l’autre pèlerin. On atteignait Serbilovo en parcourant, depuis la gare de Gavrilovo Posad une drève de bouleaux longue de sept kilomètres, battue par les vents.

Un jour j’arrivai chez eux, fin août. Mon couchage, sur le poêle de la cuisine, était occupé. En fait, toute la cuisine était occupée. Un nombre incalculable de rustiques mouches d’automne y vivaient. J’enroulai un journal et m’apprêtai à les passer impitoyablement à tabac. Mais Batiouchka entra à ce moment et il me retira la gazette de la main en me disant :
Ce soir, Katia, nous allons célébrer le moleben d’envoûtement, tiré du Grand Trebnik, au Martyr Tryphon, pour se débarrasser des cafards et des chenilles. Prenez patience jusque là. Bienheureux, qui fait miséricorde à toute créature.
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Archimandrite Naum. Nous allons te donner du souffle.

Le texte ci-dessous est la traduction d’un extrait du livre «Nous allons te donner du souffle» (Дарим Тебе дыхание), écrit par Mère Eupraxie (Inber), Higoumène du Monastère de l’Ascension, à Orcha dans Éparchie de Tver et Kachine. Le livre est paru en 2019, aux éditions Sibirskaia Blagozvonnitsa.
Ekaterina (son prénom civil) Inber fut une fille spirituelle du Starets Naum (Baiborodine ; 1927-2017) de bienheureuse mémoire. C’est celui-ci qui éduqua spirituellement celle qui était alors une jeune intellectuelle d’une vingtaine d’années, convertie à l’Orthodoxie vers la fin des années ’70 «parce que cela se faisait». Elle reçut la tonsure monastique en 1992. Le texte ci-dessous est la traduction du chapitre portant le même titre que le livre lui-même.

Elle fit sont apparition chez nous en 1997, je ne me souviens plus précisément de l’époque de l’année.
Vera arriva chez nous avec trois enfants, nous demandant de les caser. Elle raconta qu’elle avait travaillé sur les chantiers de construction, sans masque de protection ; ses poumons en avaient été cimentés. Les médecins lui donnaient encore trois mois à vivre, toute opération était impossible car les bistouris ne couperaient pas les poumons, ils les émietteraient.

L’Archimandrite Naum (Baiborodine)

Le fils fut envoyé à Zvenigorod, nous prîmes les fillettes à Orcha. Vera, je l’emmenai au bout de quelques jours à la Laure, auprès de notre Batiouchka, l’Archimandrite Naum. En ce temps-là, il nous prenait immédiatement, par petits groupes et on pouvait entendre beaucoup de choses utiles. Batiouchka avait la faculté de mener la conversation de manière telle que chacun de ceux qui étaient auprès de lui puisse en tirer profit. Mais des gens finirent par se plaindre d’avoir à se confesser devant les autres, alors tout cela fut terminé et on entrait un par un, rarement à deux ou trois si on était venus ensemble, ou si un lien d’obédience commune unissait les gens. Mais je me souviens parfaitement que jamais il n’arriva que quelqu’un entende les secret d’un autre. Soit qu’au moment voulu, un bruit inattendu retentissait, quelqu’un froissait l’emballage d’un paquet, soit que l’attention se relâchait, et quand elle se ravivait, tout le secret avait été dit. Parfois, si c’était vraiment nécessaire, le Père Naum demandait à tout le monde de sortir, et restait seul avec celui qui se confessait.
Et donc cette fois, il y avait du monde autour du Starets quand nous entrâmes, Vera et moi. Immédiatement, il m’interpella :
– Eh quoi ! Que veux-tu ?
Je lui expliquai la maladie mortelle de Vera. Il demanda alors à quelqu’un d’ouvrir un petit livre noir, un abécédaire d’une vieille édition, à la lettre D.
Voyez le texte au sujet de «dykhanié» [N.d.T. Дыхание : respiration, souffle], et lisez à voix haute…
La lecture de ce texte commença. Il était long, très long, vaguement médical. Nous écoutâmes comment s’ouvraient et se refermaient les alvéoles. Les gens était embarrassés. Chacun d’entre eux avait ses propres questions. Le temps s’écoulait, consacré on ne comprenait trop à quoi, et on aurait dit que le Starets rêvassait. Mais il tressaillit quand la lecture prit fin :
Nous allons te donner du souffle ! Un traitement gratuit. Allez-y, faites toute deux ceci. Il éleva ses bras tendus, respira profondément et expira en laissant retomber brusquement les bras.
– Respirez deux fois comme ça!
Nous exécutâmes à deux reprises cet exercice inattendu.
– Bien, j’ai perdu du temps avec vous, il y a tellement de gens qui attendent dehors. Allez, sortez d’ici !
Et il ajouta, alors que nous sortions :
– Il y a un professeur chez toi à Tver? Vas la présenter à sa consultation.
Alors que nous sortions de la cellule de Batiouchka, elle me dit :
– Quelque chose de chaud est occupé à se répandre dans mon dos.
Nous retournâmes à Tver. Nous envoyâmes Vera à l’hôpital de l’oblast. Ils firent des radios des poumons et constatèrent avec stupéfaction que ces derniers étaient comme neufs, pareils à ceux d’un nourrisson.

Monastère de Tvorojkovo, église de Très Sainte Mère de Dieu Joie de Tous les Affligés

Les années s’écoulèrent, les enfants grandirent, chacun de leur côté, et ils eurent eux-même des enfants. Vera devint la moniale Anna, Supérieure du Monastère de Tvorojkovo, dans l’Oblast de Pskov. Matouchka fut toujours empressée de réussir en toutes choses. Elle faisait tout vite et bien. Restauré, le monastère est superbe. Il resplendit de la pureté et de la beauté des ornement de l’église-reliquaire. Il est rare de rencontrer une telle quantité de trésors sacrés. On dit des gens pareils à elle qu’ils ont la main à tout. Mais parmi tout ce qu’elle était capable de faire, ce qu’elle faisait le mieux, c’était prier.

Matouchka Anna (Tkatch)

Juste à côté du monastère, à quelques minutes de bateau à travers le lac se trouve une petite île. Une église en bois et deux maisonnettes derrière une haute palissade en planches. Matouchka l’a appelée «l’Île de la prière». Elle attendait avec impatience que les maisons soient terminées, afin de s’y reclure.
Elle décéda le 17 octobre 2017, vingt ans après sa seconde naissance en ce monde, à la Laure de la Trinité-Saint Serge, dans la cellule de l’Archimandrite Naum, c’est-à-dire, tout juste quatre jours après que celui-ci soit parti pour le Royaume des Cieux. Depuis quelques mois, Batiouchka ne parvenait plus à respirer de façon autonome. Il était branché à un respirateur artificiel ventilant ses poumons.
Mais il es très vraisemblable qu’à l’époque, vingt ans plus tôt, Batiouchka Naum avait en quelque sorte «branché» Matouchka Anna à ses propres poumons, et dans les derniers jours de sa vie,alors qu’il ne pouvait presque plus respirer, Matouchka Anna se prépara à mourir. Les sœurs dirent qu’elle commençait à suffoquer, les crises d’asthme réapparurent, ainsi qu’une toux sévère. Et pendant la semaine précédant sa mort, peut-être le jour du départ pour l’éternité de Batiouchka Naum, elle vit dans le ciel le visage du Sauveur, comme s’Il l’appelait, et elle comprit tout. Deux jours avant sa mort, elle appela son fils: «Viens me dire au revoir, je vais mourir».
Matouchka mit de l’ordre dans les affaires et les documents du monastère, et prit toutes les dispositions nécessaires.
Et la veille de son dernier déplacement, chez le Métropolite pour le jour de sa fête onomastique, elle reçut la visite de l’économe du monastère, qui aperçut Matouchka allongée sur son lit, les mains jointes. «Je vais mourir», lui dit celle-ci.
Mais elle n’était pas destinée à mourir dans son lit.
Le Seigneur l’emporta comme Il jugea bon, et l’âme brûlante d’amour pour Dieu, passa par le feu, fut purifiée par le feu, afin que ses dernières infirmités et ses péchés oubliés soient brûlés dans cette flamme mortelle.
Le monde orthodoxe fut immédiatement informé de ce terrible accident – ainsi, non seulement par sa vie, mais aussi par sa mort Matouchka obtint de nombreux intercesseurs ici sur terre. Et elle atteignit son Île de prière tant attendue, dans le Royaume des cieux.
[N.D.T. Matouchka Anna (Tkatch) décéda le 17 octobre 2017 dans un violent accident de circulation sur l’autoroute R 23 dans l’Oblast de Pskov. Le véhicule dans lequel elle se trouvait brûla dans l’accident.]
Traduit du russe