Le texte ci-dessous est la suite de la traduction ( proposée en plusieurs parties) d’un résumé détaillé de la vie de Saint Seraphim de Vyritsa écrite par Alexandre Archakovitch Trofimov à partir de son livre qui compte 240 pages. L’original russe du résumé traduit ici, agrémenté de nombreuses photographies, a été publié en six parties sur le site de l’auteur, le 14 mars 2014.
Il est nécessaire de dire quelques mots de l’endroit où le Seigneur envoya le Starets Seraphim. Ce n’est pas en vain que celui-ci appelait Vyritsa «Notre Terre Sainte » et «Notre Jérusalem du Nord». Le nom du lieu provient du mot russe «vyr», qui signifie ‘gouffre’, ‘tourbillon’, ‘remous’. Cette appellation est liée à la rivière qui coule ici, l’Oridièje, affluent de droite de la Louga et qui prend sa source dans les marais du District de Tsarskoïe Selo, et est caractérisée par de nombreux tourbillons. La première mention de Vyritsa remonte à 1711. À la fin du XIXe siècle, le village, grâce à la forêt de pins, aux rives pittoresques de la rivière, au climat sain, devint l’un des lieux de résidence d’été préférés des habitants de Saint-Pétersbourg. Le propriétaire des terres à Vyritsa était le sérénissime Prince Heinrich Fiodorovitch Wittgenstein, lieutenant à la retraite du régiment des hussards de la garde de Tsarskoïe Selo. La localité s’appelait alors le Val du Prince. En 1913 fut érigée au Val du Prince une belle église en bois de deux étages, dédicacée à l’icône de la Très Sainte Mère de Dieu de Kazan à l’occasion du tricentenaire de la maison régnante des Romanov. Le destin de Saint Seraphim de Vyritsa et de ses nombreux proches est inextricablement lié à cette église. Ici le Starets célébra, et depuis sa mort, il repose dans le petit cimetière qui fait face à l’église.
La moniale Taïssia se souvient: «A Vyritsa, le Starets vécut d’abord chez un ami de la rue Olgopol, puis dans une maison de l’Avenue Pilnyi. Plus tard, il vécut à l’Avenue de Mai, au 41 (maintenant 39). Batiouchka avait une petite cellule au rez-de-chaussée. La maison a un étage; elle est très belle, peinte en rose, avec des tourelles sculptées. Il va de même de la maison Avenue de Mai, avec une clocheton, comme dans les temps anciens. Les deux maisons existent encore à présent. Les propriétaires de la maison de Pilnyi Prospekt étaient Lydia Tomovna et son frère Vladimir Tomovitch Tomberg. Tous deux étaient profondément croyants, des gens des plus gentils et des plus nobles. Au rez-de-chaussée, une chambre avait été attribuée à Batiouchka (Ils ne l’ont pas utilisée après la mort du Starets, la conservant révérencieusement en sa mémoire). Lydia Tomovna raconta que quelques années avant la guerre, le Père Seraphim avait dit à sa fille spirituelle, Evdokia Mikhailovna : «Construisez à Vyritsa, parce que la guerre pourrait survenir, et la famine». Ils construisirent par précaution à Vyritsa. Ce n’est qu’un des nombreux cas de clairvoyance du Starets».
Batiouchka percevait l’état spirituel de ses enfants spirituels où qu’ils se trouvent. Quand la situation était particulièrement difficile pour l’un ou l’autre, il envoyait, en plus de l’aide de sa prière, des messagers, par exemple à ceux qui étaient en deuil ou malades, les incitant à venir auprès de lui à Vyritsa ou encore, il leur envoyait une prosphore, l’un ou l’autre cadeau. Voici quelques cas semblables.
Un jour, Batiouchka dit à sa fille spirituelle Evdokia:
– Voici l’adresse où vit la servante de Dieu Anna, elle a un chagrin immense, qu’elle vienne à moi.
Suite à ces paroles du Starets, Evdokia parti à la recherche d’Anna. Et effectivement, sa vie de couple était un échec, leurs enfants étaient gravement malades et elle-même était désespérée. Anna ne savait pas que le Père Seraphim vivait à Vyritsa. Elle allait le voir à la Laure avant que tout s’effondre, et elle était très affligée, ayant perdu son starets et consolateur. Et dans ce moment difficile pour elle, le Starets lui-même l’appela auprès de lui, la calma, et l’aida à résoudre les problèmes de sa vie.
Théodosia, une fille spirituelle du Starets, était une femme aisée avant la révolution. Elle aidait par tous les moyens la Laure Saint Alexandre Nevski. Mais il advint que les moines de Laure furent envoyés en exil et que Théodosia elle-même fut sanctionnée.
Elle revint des camps, en mauvaise santé, privée de moyens de subsistance et de logement, et, désespérée, elle décida que l’heure de sa mort était arrivée. À ce moment-là, un messager du Starets vint à elle et lui dit:
– Batiouchka t’appelle chez lui à Vyritsa.
Ce qui se passa ensuite, Théodosia le raconta elle-même: «Je n’ai pas cru en ces paroles et j’ai dit: ‘si c’est mon père spirituel, qu’il me guérisse, alors j’irai chez lui!’. Après avoir entendu ce propos audacieux, le messager de Batiouchka s’en alla. Le lendemain matin, j’ai ressenti avec étonnement une poussée de force, de vitalité, un rétablissement complet et j’ai décidé que je devais aller à Vyritsa. Bien que je ne croyais pas complètement aux paroles de l’envoyé, j’avais décidé d’aller tout de même vérifier. Quand j’arrivai sur place, je vis réellement le Starets, et il me dit ces paroles de l’Évangile: ‘heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru’ (J.20;29). Le visage baigné de larmes de joie, je suis tombée aux pieds de mon père spirituel qui n’oublie pas ses enfants et les fortifie dans la foi».
… Arrivèrent chez Batiouchka une mère avec sa fille, dont la main gauche était desséchée. La mère, qui avait entendu parler des miracles accomplis par les prières du Starets, avait amené sa fille malade dans l’espoir d’une guérison. Dans la cellule du Père Seraphim, quand elles s’approchèrent pour recevoir la bénédiction, Batiouchka se leva de son fauteuil et s’appuya, comme par inadvertance, sur l’épaule gauche de la jeune fille. À ce moment-là, celle-ci sentit le flux sanguin entrer dans sa main desséchée et la main commença à bouger. La suite toute entière de la vie de cette fille guérie fut liée à son cher Batiouchka. Plus tard, mariée avec bonheur, elle amena ses enfants pour qu’ils reçoivent la bénédiction du Starets.
Le Seigneur révélait au Starets le jours de la mort des gens, et il arrivait qu’il envoie son auxiliaire, Matouchka Seraphima, à certains d’entre eux pour qu’ils se préparent à la transition vers l’éternité. C’est pourquoi certains proches de Matouchka Seraphima l’appelaient parfois «l’ange de la mort».
…Une fois avant la guerre, l’un des pèlerins s’adressa à Batiouchka et, le plaignant, lui dit:
– Père, vous avez tant souffert pour nous: les fatigues, la maladie, la souffrance. Que Dieu vous aide!
– Que le Seigneur, t’aide toi aussi, répondit le Starets qui voyait le destin de cet homme.
Celui-ci fut par la suite arrêté et envoyé dans un camp. Souvent, il se rappela les paroles du Père Seraphim. De nombreux enfants spirituels du Starets, particulièrement les moines et membres du clergé, se retrouvèrent dans les camps, en prison, en détention. A la première occasion, Batiouchka entamait une correspondance avec eux, leur envoyait des victuailles et de l’argent. (A suivre)
(Traduit du russe).
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