Quand le Christ apparut à Saint Païssios l’Athonite

A ce jour, trois volumes des Paroles de Saint Païssios l’Athonite ont été traduits en français. Alors que les six volumes en grec ont été traduits en russe depuis des années. Le texte ci-dessous est la traduction d’un extrait du volume II L’Éveil Spirituel, dont la traduction russe a été publiée en 2001 aux Éditions Orthograph à Moscou. Le présent texte sera sans doute moins fidèle à la lettre de l’original grec que la traduction française officielle que nous attendons tous, mais malgré cela, les lecteurs francophones auront un avant-goût de ce que nous attendons tous et que la patience nous proposera dans plusieurs années peut-être, lors de la parution de ce volume en français. Il s’agit ici d’un extrait du chapitre 2 de la quatrième partie, pages 273 à 275 de l’édition russe.

Geronda, je suis perturbée par des pensées d’incroyance qui s’abattent sur moi.
Le fait que tu sois perturbée et que tu n’acceptes pas ces pensées, cela signifie qu’elles viennent du mauvais. Parfois, Dieu permet que nous ayons des doutes ou une hésitation dans notre foi, pour vérifier nos dispositions et notre philotimo 1 . Mais notre Dieu, ce n’est pas une fable, comme celle au sujet de Zeus, Apollon et les autres soit-disant «dieux». Notre foi, elle est vraie et vivante. Nous avons une nuée de saints (Heb.12;1), comme l’écrit l’Apôtre Paul. Ces gens connurent le Christ, ils firent l’expérience d’une relation personnelle avec Lui, et ils se sacrifièrent pour Lui. A notre époque aussi, il y a des gens qui se consacrent à Dieu et qui font l’expérience d’états célestes. Ils sont en contact avec les anges, avec les saints, et même avec le Christ et la Très Sainte Mère de Dieu. Pour t’aider, je vais te raconter quelque chose à mon sujet. Tu vois, moi aussi, je «donne mon sang», je parle d’actions pour aider les autres.
Voyant comment les connaissances recueillies par l’homme chassent la foi hors de lui, je veux la renforcer, en racontant quelques événements dans le domaine de la foi.
Quand j’étais petit, nous vivions à Konitsa. Je lisais beaucoup de vies de saints, et je les donnais à lire à d’autres enfants, ou je rassemblais les copains et nous lisions ensemble. Je me réjouissais particulièrement des grands saints, héros de l’ascèse de la foi et du jeûne qu’ils s’imposaient, et j’essayais de les imiter. Mon jeûne eut pour conséquence que mon cou ressemblait à une queue de cerise. Les copains se moquaient de moi: «Ta tête va tomber». Qu’est-ce que j’ai enduré à cette époque !… Mais laissons ça. Mon frère aîné, voyant que je devenais malade à cause des jeûnes craignit que je ne puisse terminer l’école, me prit les brochures avec la vie des saints que j’étais en train de lire. Une fois, un de nos voisins, appelé Costas, dit à mon frère : «Je vais lui remettre le cerveau en ordre. Je vais faire en sorte qu’il jette les livres qu’il lit et qu’il arrête le jeûne et les prières». Eh quoi, il vint me trouver. J’avais environ quinze ans, alors. Et il m’enseigna la théorie de Darwin. Il parla et parla, jusqu’à ce que j’en perde la tête. Et avec la tête toute embrouillée, je me précipitai directement dans la forêt, à la chapelle de Sainte Barbara. Y entrant, je demandai au Christ : «Mon Christ, si Tu existes, apparais devant moi!». Je répétais cela sans cesse, en faisant des métanies. C’était l’été. La sueur dégoulinait le long de mes bras, j’étais trempé. Finalement, je m’écroulai de faiblesse. Mais je ne vis rien, ni n’entendis rien. Eh bien, il s’avère que Dieu ne m’aida pas, même pas d’un petit craquement, d’une ombre, rien ; mais finalement, je n’étais encore qu’un gamin. Observant du point de vue humain, ou à l’aide de la logique, ce qui se passa, on pourrait dire : «Mon Dieu, c’est triste pour lui, le pauvre! A partir de onze ans, il a commencé à gravir les échelons, il a mené une fameuse ascèse, et maintenant, il est en crise. Il avait la tête embrouillée par des théories farfelues, à la maison, son frère lui mettait des bâtons dans les roues, il s’est enfui dans la forêt pour demander Ton aide…». Mais pas de réponse, rien de rien !!! Épuisé par les métanies, je m’assis et je me dis : «Mais bon, quelle réponse fit Costas quand je lui demandai son avis sur le Christ?» «C’était l’Homme à la plus grande bonté, le plus juste. Par Ses enseignements, Il a bousculé les intérêts des Pharisiens, qui L’ont crucifié par envie». Alors je décidai ceci : «Puisque le Christ fut cet Homme si bon et juste, à un point tel qu’il n’y en eut pas un autre pareil à Lui, puisque les mauvaises gens Le tuèrent par envie et méchanceté, alors, pour cet Homme, je dois faire plus que ce que je n’ai fait. Je dois même être prêt à mourir pour Lui». Je venais à peine de me dire cela que le Christ m’apparut. Il apparut au milieu d’une lumière intense, la chapelle resplendissait. Il me dit «Je suis la Résurrection et la Vie. Celui qui croit en Moi, fût-il mort, vivra»(Jean11;25-26). D’une main, Il tenait un Évangile ouvert, sur lequel je lus les mêmes paroles. Il se produisit un tel changement intérieur en moi, que je répétais sans aucune arrêt: «Eh ben, Costas, vient donc ici maintenant, et on discutera pour voir si Dieu est ou s’Il n’est pas!»
Tu vois, avant de m’apparaître, le Christ a attendu que je prenne une décision pleine de philotimo. Et s’Il veut une décision pleine de philotimo d’un gamin, combien plus la veut-Il d’un adulte ?
Traduit du russe

Source :  Преподобный Паисий Святогорец «Слова. Том II. Духовное пробуждение». Издательство:Орфограф, Москва. Pp. 273-276.

Le Starets Adrian (Kirsanov), le fort en Dieu. (2)

Le texte ci-dessous est la deuxième partie de la traduction d’un texte russe de Madame Maria Poukhova «Сильный о Боге» К пятилетию со дня кончины архимандрита Адриана (Кирсанова), publié le 28 avril 2023 sur le site Pravoslavie.ru pour le cinquième anniversaire de la natalice de l’Archimandrite Adrian (Kirsanov)
Voici cinq ans, le 28 avril 2018, décédait dans sa 97e année l’Archimandrite Adrian (Kirsanov), starets clairvoyant et moine du Monastère de la Dormition de la Très Sainte Mère de Dieu à Pskov-Petchory. A l’occasion du cinquième anniversaire de la juste dormition du starets, nous publions quelques souvenirs de ses enfants spirituels.

Quand le tirage du premier livre concernant le Père Adrian, «Le Thaumaturge de Petchory» fut envoyé à Moscou, des paroissiens de notre église se réunirent à l’entrepôt pour le déchargement. Un homme se tenait près d’eux. Il venait de déposer son véhicule aux installations juste à côté du dépôt, pour le faire nettoyer. L’homme fumait nonchalamment en attendant que sa fourgonnette soit prête. Quand la camionnette de la typographie arriva et que les palettes du livres furent déchargées, il… se mit soudain à aboyer. Il se tenait là debout et aboyait d’une voix profonde. Il fut incapable, le pauvre, de s’arrêter tant que les portes du dépôt ne se refermèrent sur les palettes de livres, car il aboyait contre eux…
Le Père Adrian disait que si nous faisons un seul faux pas, nous pouvons devenir la proie des démons. Lui, il les combattit toute sa vie. Le Seigneur lui donna une grâce spéciale permettant de vaincre ce mal antique. Une de mes connaissances suspendit au-dessus de sa table une photo du Starets. Et quand son parent buveur vint la voir et entra dans la pièce, il frissonna «Qui est-ce?». Le pauvre, il ne pouvait pas supporter la photo du Père d’Adrian et s’efforça de quitter les lieux rapidement! Comme pendant sa vie, les malades sentaient son approche, après sa mort, il brûle encore l’ennemi par la simple reproduction de son apparence.
Le Père Adrien reçut une grâce, une force spéciale du Seigneur, celle de combattre les mauvais esprits de l’air. Avec la bénédiction du Patriarche Alexis Ier de Moscou et de toute la Russie, il a porté pendant plus de 30 ans la lourde Croix d’un service ecclésiastique rare, celui de célébrer les offices pour expulser les mauvais esprits.
«Il n’est pas raisonnable pour n’importe qui de contredire le diable, mais seulement pour les forts de Dieu, à qui obéissent les démons, a déclaré Saint Barsanuphe le Grand. Si l’un des faibles les contredit, il tombe sous leur pouvoir, les démons le maudissent, affirmant qu’il les contredit. Beaucoup de saints ont-ils barré la route au diable, comme Saint Michel l’Archange, qui le fit parce qu’il en avait le pouvoir? Les expulser est l’affaire des grands hommes… Nous, les faibles, ne pouvons que recourir au nom de Jésus.»
Des enfants spirituels du Starets se souviennent :
«Celui qui aime Dieu, il est tout lumineux, et tout son amour se déverse sur son prochain, et le prochain baigne dans cet amour. C’est pourquoi autour du Père Adrian tout était toujours chaleureux, l’âme s’apaisait, le cœur se réchauffait, s’emplissait de la joie céleste.»
Des iconographes venus pour la première fois de Géorgie chez le Père Adrian se souvinrent chaleureusement de cette rencontre. Ils s’approchèrent de lui pour recevoir l’onction, et Batiouchka leur dit :
– Ah, des yeux familiers!
– Nous sommes iconographes!
– Alors je comprends, sourit le Starets…
Un jour, des amis, une famille nombreuse portant le «délicieux» patronyme d’Abricot, arrivèrent chez le Starets. Et il leur a dit: «Oh, les abricots sont arrivés, mais je ne vois pas de fruit!» Il y avait là de quoi réfléchir…

Starets Adrian

Nadejda, une fille spirituelle du Starets, se souvient : «Le Père Adrian est un thaumaturge. Il y avait un nombre incroyable de guérisons autour de lui. Je peux dire que je suis handicapée depuis mon enfance et que je serais morte depuis longtemps sans ses prières». Quand chez Nadejda du myrrhon s’écoula d’une photo du Père d’Adrian, elle vint au monastère et le raconta au Starets. Le Père se tut pendant longtemps, puis dit pensivement: «Ce ne sont que mes larmes pour vous...».
Un jour, une institutrice s’adressa au fils de Nadejda : «Je sais que votre famille va à Petchory voir Batiouchka Adrian. Dites à votre maman de lui demander s’il peut prier pour ma petite-fille Juliette : elle doit subir une nouvelle opération des reins. Elle est déjà couverte de cicatrices, une plaie vivante!». A cette époque, cette pauvre femme avait perdu tout courage, comprenant que les médecins ne pouvaient aider sa petite-fille. Et comme celle qui va se noyer se raccroche à la moindre paille qui flotte, elle demanda l’aide de gens croyants. Elle n’avait plus personne en qui espérer, sinon en Dieu. Nadejda communiqua bien sûr cette demande au Père Adrian, et il bénit «Dis-lui : qu’elle donne de la kacha à la petite». Voilà tout ce que fut sa réponse. Rentrée à la maison, Nadejda téléphona immédiatement à l’institutrice : «Ne vous étonnez pas, le Starets a béni que vous nourrissiez la petite avec de la kacha. Faites-la obéir». A ce moment, on récoltait déjà les fonds pour faire opérer la fillette en Israël. Mais mère et fille prirent la réponse de Batiouchka comme parole de Dieu et nourrirent consciencieusement la petite de kacha, d’abord par cuillerée, puis deux, puis une pour mami et une pour papi… D’où aurait-elle tiré son appétit? La maladie l’avait rendue diaphane; il ne restait quasi plus de vie en elle. Et cette seule kacha, bénie par le Starets, agit de façon miraculeuse sur le petit enfant. Juliette reprit vie, retrouva de la joie, et son appétit revint. La joie de la mère ne connaissait pas de limite en voyant son enfant chéri, qu’elle avait été à deux doigts de devoir enterrer, et que le Starets avec arraché à la tombe. Et bien sûr, il n’était plus question d’aucune opération.
Nadejda racontait que quand elle «se souvenait de Batiouchka, ces paroles de l’Évangile lui venaient à l’esprit : «Il ne disputera point, il ne criera point, et on n’entendra pas sa voix dans les places publiques. Il ne brisera point le roseau froissé et n’éteindra point la mèche qui fume encore»(Mat.12;19-20). Ainsi, patiemment et avec bienveillance, le Père Adrian me mena de sa main, des ténèbres à la lumière. Quand Batiouchka passa dans l’autre monde, j’ai cessé d’être maternée, portée dans les bras. Je pensais que je ne pouvais tenir sur mes jambes, que je tomberais sans cesse. Mais le Père Adrian est tellement fort dans ses intercessions devant le Seigneur, qu’il continua à m’aider après sa dormition : comme s’il me tenait d’une main ferme par la peau du cou : «Avance Nadejda, avance!» Et j’essaie, j’avance, par ses saintes prières…»
On pouvait aller poser n’importe quelle question au Père Adrian, même les plus insolubles. Et soudain, tout se mettait en place, et le pèlerin voyait s’ouvrir à lui la suite de son chemin, le chemin le plus court vers le salut. Et le Starets le guidait. Ce n’était pas par hasard qu’on surnommait le Père Adrian «Batiouchka le consolateur».
Ses enfants spirituels racontaient qu’«il consolait toujours, calmait, trouvait les paroles qu’il fallait. On le quittait comme avec des ailes, comme si on n’était plus sur terre mais au-dessus».
En 2018, Mikhaïl Ivanovitch T. vint de Biélorussie voir son père spirituel, le Père Adrian. Après la liturgie dans l’église, l’auxiliaire de cellule vint le trouver et lui dit que Batiouchka l’appelait. «Quand nous sommes entrés dans la cellule, se souvient Mikhaïl Ivanovitch, le Starets était tout faible, allongé. Me voyant, il se réjouit et s’assit sur son lit. Et soudain, à ce moment, le Père Adrian et toute la cellule resplendirent d’une lumière exceptionnelle!». Batiouchka tenta de minimiser : «C’est le Père Supérieur qui a installé un si bon éclairage dans le monastère!». Mais Mikhaïl Ivanovitch et l’auxiliaire de cellule était pétrifiés, ils ne pouvaient reprendre leurs esprits, tellement ils étaient stupéfaits par cette lumière non-terrestre, par le sentiment de joie, de grâce, qui émanait du Starets, et par la beauté spirituelle exceptionnelle de son visage. Et Mikhaïl Ivanovitch ajoutait : «Batiouchka ne nous donna pas l’occasion de reprendre nos esprits, il commença à parler de divers péchés, et dit ensuite : ‘Tu vois, Michenka, je me prépare à la confession, et après l’office, on va me donner les Saints Dons !‘. Ensuite il me fit une onction d’huile sainte et dit : ‘Viens me voir le 28 avril, le jour anniversaire de ton épouse!‘».

Les bienheureux startsy Ioann et Adrian

Visiblement, le Père Adrian connaissait le jour de sa dormition : le 28 avril 2018, dans sa 97e année Batiouchka s’en alla vers le Seigneur. Ses enfants spirituels étaient orphelins. Notre «Batiouchka consolateur» nous avait quittés, mais sa prière ne s’éteignit pas, elle resplendit avec plus de clarté encore devant le Trône du Seigneur, et la Sainte Rus’ acquit un nouvel intercesseur céleste.
Batiouchka disait : «Quand je serai parti, ma prière sera encore plus forte, plus puissante, venez seulement me demander, venez, demandez !…»
Traduit du russe
Source

Le Starets Adrian (Kirsanov), le fort en Dieu. (1)

Le texte ci-dessous est la traduction d’un texte russe de Madame Maria Poukhova «Сильный о Боге» К пятилетию со дня кончины архимандрита Адриана (Кирсанова), publié le 28 avril 2023 sur le site Pravoslavie.ru pour le cinquième anniversaire de la natalice de l’Archimandrite Adrian (Kirsanov)
Voici cinq ans, le 28 avril 2018, décédait dans sa 97e année l’Archimandrite Adrian (Kirsanov), starets clairvoyant et moine du Monastère de la Dormition de la Très Sainte Mère de Dieu à Pskov-Petchory. A l’occasion du cinquième anniversaire de la juste dormition du starets, nous publions quelques souvenirs de ses enfants spirituels.

Une rencontre avec le Starets, c’était comme un ruisseau vivifiant, ou une brise rafraîchissante, qui refroidit la tête enflammée par les pensées et les doutes, et apporte calme et paix à l’âme. Le Père Adrian (Kirsanov) était le guide spirituel de milliers et de milliers de fidèles orthodoxes en Russie et dans le monde entier.
En glorifiant les saints, nous glorifions le Seigneur avant tout, Lui qui les a choisis, les a sanctifiés et demeure en eux, comme en Ses temples non-faits de main d’homme. Quand on s’approche, jusqu’à la toucher même un tant soit peu, de la vie d’un homme qui plaît à Dieu, même si on ne participe que très brièvement à son podvig, alors s’ouvre devant nous comme un rideau spirituel et les limites du monde invisible peuvent s’effacer pour un instant. L’écrivain Nina Pavlovna a raconté cela à mon amie la moniale Élisabeth quand elle rendit visite à celle-ci à Optino. Nina Pavlovna expliqua que pendant qu’elle écrivait le livre «Pâques rouges», elle subit d’évidentes attaques démoniaques. Une d’elles se produisit alors qu’elle traversait le bosquet de la skite. Autour, il n’y avait pas une âme. Soudain, comme surgi de terre apparut devant elle un moine en sous-rason noir. Son visage exprimait une haine si féroce que Nina Alexandrovna s’arrêta, en désarroi. Et le «moine» avança les mains vers les yeux de Nina, clairement pour les arracher. Elle parvint à se signer, alors l’attaquant laissa tomber les bras et … disparut.
Et quand on préparait pour l’impression la série de livres au sujet de l’Archimandrite Adrian, notre petit collectif d’édition subit également les attaques des forces invisibles du mal. Mais tout cela apporta un bénéfice spirituel, éclaircissant et fortifiant notre foi.
Saint Jean Chrysostome a dit que : «lorsque nous jouissons de la faveur d’En-haut, non seulement nous pouvons éviter les calomnies des méchants, mais si des bêtes féroces nous attaquent, nous n’en subissons aucun dommage…».
La moniale Mariamna se souvient : «Il priait, comme ça, et tout se mettait directement en place. Comment, personne ne le comprenait, on pouvait juste s’en émerveiller». Pendant trente ans, la moniale Mariamna mena son obédience auprès du Père Adrian. Elle apprit à renoncer à sa propre volonté devant le Starets, et progressivement, son cœur s’attendrit et apprit les principales vertus chrétiennes: l’humilité et l’amour. «Parfois, c’était si dur que quand j’arrivais près du Père Adrian, je ne pouvais prononcer que deux mots ‘aidez-moi!’Et il me répondait: ‘Je sais, je sais tout, je vais prier pour toi!’. Oui, c’était dur, mais quand je m’éloignais alors de Batiouchka, je sentais que des ailes me poussaient sur le dos. C’est tout juste si elles ne me soulevaient pas du sol et que je ne m’envolais pas! Voilà les consolations que je recevais. Toute ma croissance spirituelle est liée au Père Adrian. A travers les startsy, le Seigneur envoie tant de grâce que parfois, on n’est pas capable de la recevoir. Mais on sait toujours qu’après, il va falloir tenir bon! Et il faut être d’accord de vivre les afflictions et les endurer. C’est pourquoi, n’importe qui ne peut entretenir une relation avec un starets, loin de là..
Pleine d’ignorance, comme la mariée dans l’antiquité,
Je marche au hasard pour acquérir de l’expérience.
ainsi Dieu me martèle jusqu’à ce qu’il ne reste plus un espace vivant,
Afin d’accepter Sa Bonne Nouvelle sans un cri …
Ces lignes de la poétesse Sofia Agayanz semblent dédiées à la moniale Mariamna, l’une des filles spirituelles les plus proches du père Adrian. Le Starets s’adressait affectueusement à elle: «ma petite fille!» Mais pour devenir sa «petite fille», elle dût suivre la dure école de la formation spirituelle: apprendre la patience dans les afflictions, l’humilité et l’obéissance. Le deuxième livre de la série «Par les prières des startsy», consacré à la mémoire de l’Archimandrite Adrian est intitulé «Ma petite fille!». La Divine Providence voulut qu’il sortit d’édition le jour du cinquième anniversaire de la natalice du Père Adrian.
Avant cette sortie, la moniale Mariamna dût traverser bien des épreuves : maladies, désagréments, afflictions inattendues s’abattaient sur son entourage le plus proche. Quand à la veille de la fête, elle se préparait à la communion, ses jambes se mirent à gonfler de façon inattendue et douloureuse, au point qu’il fallut appeler les soins urgents, car on soupçonnait une thrombose. Elle fut admise quelques heures en observation, puis on lui permit de sortir en début de nuit.
Lorsque notre rédactrice Nina Ivanovna commença travail à partir du livre manuscrit, elle s’y consacra jusqu’au milieu de la nuit. Le faubourg de Moscou, dans lequel elle vit, s’était calmé depuis longtemps, la journée chaude avait été remplacée par la fraîcheur de la nuit. Nina se mit au lit, mais une demi-heure plus tard, elle sursauta au son de voix masculines bruyantes: apparemment, une compagnie ivre passait devant sa clôture. Selon le timbre des voix, elle détermina qu’ils étaient jeunes, mais leur discours était étrange: une langue inconnue, plutôt un ensemble de sons… Et puis éclata une musique si terrible, insupportable à l’ouïe, que Nina Ivanovna se souvint de ses jeunes années: «Cela ne se compare à aucune discothèque, cela devait s’entendre, probablement, à plusieurs kilomètres, ils avaient réveillé tout le village!» Et cette musique (si on peut l’appeler ainsi) était sans mots et ressemblait aux sons de l’harmonica. Et c’était tellement inhabituel que Nina se ressaisit finalement et commença à prier. Quand elle traça le signe de croix sur la fenêtre, la cacophonie déchirante s’interrompit immédiatement. «J’ai eu l’impression d’être sourde à cause du silence qui se réinstallait, se souvient-elle en frissonnant. Et puis il y a eu un piétinement et un coup fort sur mon portillon de fer, comme si on voulait le renverser. Et après ça, je n’ai plus entendu de bruit! J’ai aussi pensé: Comment est-possible? S’ils ont éteint leur magnétophone, ou ce qu’ils avaient là, s’il ont frappé la barrière, pourquoi n’ont-ils pas dit un mot après cela? Cette compagnie ivre aurait dû se retirer, et je l’aurais certainement entendue…». Et quand la nuit suivante, une créature, clairement pas un chat ou un homme, hurla sauvagement sous sa fenêtre, elle décida de déménager d’urgence à Moscou chez sa sœur. Dieu merci, après avoir prié et tracé le signe de croix sur la fenêtre, tout s’est calmé. «Oui, ce n’était pas facile de travailler sur ce livre», admit Nina. «Et si je n’avais pas reçu la bénédiction de mon père spirituel, je n’aurais pas pu le terminer.» Et après la prière au Père Adrian, ces phénomènes ne se répétèrent plus.
Notre bienfaitrice fit un rêve remarquable avant l’envoi de la maquette du livre à la typographie. Larissa raconta : «Je me suis retrouvée dans un endroit sombre et inconnu, et je voyais devant moi des hommes barbus et trapus, très semblables les uns aux autres. Ils étaient quinze, se tenaient par groupes de deux ou trois près de moi et me transperçaient littéralement du regard. Et le regard de tous était identique, insolent, je ne peux pas le qualifier autrement. L’un d’eux était plus proche de moi, et j’ai demandé ce qu’il me voulait. «Voilà, ça!» et il a sauté vers moi et s’est agrippé à moi en s’affaissant. J’ai compris: maintenant, il va me glisser vers le bas, sous terre! Gloire à Dieu, à cet instant, je me suis souvenue du starets, et rassemblant mes dernières forces, j’ai hurlé, ou plutôt glapi d’une voix sifflante car j’étais comme mortellement prise dans un collet d’acier : «Père Adrian, aide-moi!». A la seconde-même, je m’éveillai, et à mon plus grand effroi je sentis sur ma poitrine et mon ventre comme un bloc de pierre. Je me suis mise à le secouer et finalement je compris que je pouvais me lever. Je courus prendre de l’eau sainte et mon livre de prières… ». (A suivre)
Traduit du russe

Source

Saint Luc de Crimée. La commémoration des défunts.

«... en 38 années de sacerdoce presbytéral et épiscopal, j'ai prononcé environ 1250 homélies, dont 750 furent mises par écrit et constituent douze épais volumes dactylographiés...»
(Le Saint Archevêque Confesseur et chirurgien Luc de Crimée)
1

Homélie prononcée par Saint Luc de Crimée,le 11 avril 1948. Le texte original a été publié sur le site Na gore.ru

A mon plus grand chagrin, certains d’entre vous on commencé à fréquenter les assemblées des sectateurs et y ont été contaminés par leurs enseignements mensongers. Certains ont été infectés par l’enseignement mensonger selon lequel il ne faudrait pas prier pour les défunts et ne pas offrir d’aumônes pour le repos de leur âme. Mais vous savez très bien que pendant le Grand Carême, on commémore les défunts chaque samedi. Par conséquent, vous devez vous affermir dans la doctrine orthodoxe au sujet de la commémoration des défunts, et il est nécessaire que vous ne croyiez pas ce que vous entendez de la bouche des renégats sortis de l’Église.
Qu’enseigne l’Église? Nous disposons de preuves anciennes, très anciennes, selon lesquelles même les Saints Apôtres commémoraient les défunts et priaient pour eux. Dans les ouvrages des Pères de l’Église qui sont parvenus jusqu’à nous, nous avons des preuves que déjà dès le début, dès les tout premiers siècles du Christianisme, on priait pour les défunts et ils étaient commémorés. La première liturgie dont il est fait mention est la liturgie dite de Saint Jacques, le frère du Seigneur. Et écoutez quelle prières contient cette liturgie pour ceux qui se sont endormis: «Souviens-toi, Seigneur, Dieu des esprits et de toute chair, des orthodoxes dont nous avons fait mémoire ou pas. Donne-leur le repos dans la terre des vivants, dans les délices du Paradis, dans le sein d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, là où il n’y a ni douleur, ni chagrin et ni gémissements, où la lumière de ton visage veille et brille sur nous pour toujours. Et donne une fin chrétienne à nos vies, agréable, sans péché et en paix, Seigneur, nous rassemblant autour du trône de tes élus, dans la honte et avec transgressions, quant tu veux et comme tu veux, par ton Fils Unique-engendré, notre Seigneur et Dieu et Sauveur Jésus Christ, car il est le seul sans péché qui soit apparu sur terre.» Voyez comme cette antique prière est semblable à celle que vous entendez lors de chaque liturgie : «Dieu des esprits et de toute chair…». Nous y retrouvons les mêmes mots. Comprenez ainsi que la coutume de la commémorations des défunts par l’Église remonte aux temps apostoliques et qu’à toutes les époques de l’histoire de l’Église, on a commémoré les défunts.
Et dites-moi donc, qui convient-il d’écouter, les renégats qui se sont éloignés de l’Église, les sectateurs ou Saint Jean Chrysostome? Écoutez les paroles de celui-ci : «Ce n’est pas en vain que les apôtres ont établi de commémorer avant les Saints Mystères ceux qui se sont endormis : ils savaient que les Saints Mystères présentaient un grand bénéfice pour les défunts, une grande bénédiction. Les offrandes pour les défunts ne sont pas vaines, les prières ne sont pas vaines, les aumônes ne sont pas vaines, tout cela a été établi par l’Esprit-Saint, souhaitant que nous recevions les faveurs des uns les autres». Souvenez-vous de ces paroles, et soyez convaincus que la commémoration de ceux qui se sont endormis a été instaurée par les apôtres et, comme le dit Saint Jean Chrysostome, par l’Esprit-Saint Lui-même.
Et ce n’est pas seulement à l’époque du Nouveau Testament, mais déjà à celle de l’Ancien Testament , qu’on commémorait les défunts et pratiquait des offrandes pour eux.Voici les paroles du Prophète Baruch : «Seigneur, Souverain de l’univers, Dieu d’Israël, écoute donc la prière des morts d’Israël, des fils de ceux qui ont péché contre toi,(…)» (3;4). Comme vous le constatez, le prophète parle des prières des défunts eux-mêmes, cela ne signifie-t-il pas que nous devons soutenir la force de leurs prières par nos prières pour eux?
Dans l’Écriture Sainte, on trouve des affirmations claires de la pratique d’offrandes pour les défunts des siècles avant la Nativité du Christ.
Vous ne connaissez malheureusement pas la grande histoire des guerres de partisans lancées par les frères Maccabées emmenés par le premier d’entre eux Judas, contre le roi Épiphane d’Antioche, qui s’était fixé pour objectif de détruire la foi du peuple juif, de les convertir tous au paganisme. Cette histoire est frappante: leur courage est frappant, l’aide de Dieu à leur cause est frappante. De façon générale, le Seigneur les a tous préservés. Mais un jour, plusieurs hommes tombèrent au combat. Judas était très confus: «comment, Seigneur, Tu nous as quittés?». Mais quand ils examinèrent les cadavres des victimes, ils trouvèrent des objets volés à ceux contre lesquels ils combattaient. Affligés profondément, tous se sont tournés vers la prière, demandant que le péché commis par leurs soldats déchus soit complètement effacé. Et le vaillant Judas, après avoir collecté jusqu’à 2000 Drachmes d’argent, les envoya à Jérusalem pour offrir un sacrifice expiatoire pour leur péché, afin qu’ils soient tous absous de ce péché (2 Mac. 12:32-45). N’est-ce pas une preuve vivante que l’Ancien Testament ne rapporte pas seulement les prières, mais aussi les offrandes pour les pécheurs morts?
Sur quel fondement reposent les doutes de ceux qui écoutent les sectaires, qui écoutent les luthériens? Ils sont basés sur le fait que, comme l’indiquent les sectaires baptistes, les évangélistes, il n’y a pas d’indications directes dans les Saintes Écritures invitant à prier pour les morts, mais cela signifie-t-il que ces prières soient inutiles et même qu’elles ne plaisent pas à Dieu? Cela ne le signifie pas, car le Saint Apôtre Jacques, dans l’épître conciliaire, dit de prier les uns pour les autres (5;16). Cela ne veut pas dire que nous ne devons prier uniquement pour ceux qui sont vivants, qui sont autour de nous, car vous savez que «Dieu n’est pas le Dieu des morts, mais le Dieu des vivants» (Mc.12:27). Car Il a témoigné Lui-même que tous sont vivants devant Dieu.
Quand un homme vient à mourir, cela ne signifie as que son âme cesse d’exister : le corps se désintègre mais l’âme est immortelle, elle est vivante, même si elle ne vit pas ici avec nous mais dans l’autre monde, tout comme les saints vivent dans l’autre monde, ces saints auxquels les luthériens et les sectateurs ne veulent rendre aucun hommage ni adresser aucune prière. Ne s’agit-il pas d’incroyance en l’immortalité de l’âme? Car s’ils croyaient que tous sont vivants devant Dieu, que «Dieu n’est pas le Dieu des morts, mais le Dieu des vivants», ils ne croiraient pas qu’ils ne faut pas commémorer ceux qui se sont endormis. Ils croiraient alors qu’il faut comprendre le commandement de l’Apôtre Jacques comme nous intimant de prier aussi pour ceux qui sont dans l’autre monde. Nier l’immortalité de l’âme, cela veut dire nier le Christianisme lui-même, car l’enseignement du Christ est l’enseignement de la vie éternelle. La vie éternelle serait-elle possible sans l’immortalité? Nier l’immortalité signifie mettre à rien les paroles directes et claires du Seigneur Jésus, prononcées dans la parabole du riche et de Lazare, qui décrit le sort dans l’au-delà tant du riche que du pauvre Lazare (Lc. 16:20-31). Eh bien, si certains ne reconnaissent pas, comme les matérialistes, l’immortalité; nous devons être affermis dans l’idée qu’il y a de l’espoir aussi pour les frères qui se sont éloignés de nous.
Vous entendez souvent, chaque samedi, dans la liturgie les paroles de Saint Paul: «Mais nous ne voulons pas, frères, que vous soyez dans l’ignorance au sujet de ceux qui se sont endormis, afin que vous ne vous affligiez pas, comme les autres hommes qui n’ont pas d’espérance. Car si nous croyons que Jésus est mort et qu’il est ressuscité, croyons aussi que Dieu emmènera avec Jésus ceux qui se sont endormis en lui. Voici, en effet, ce que nous vous déclarons d’après la parole du Seigneur : Nous, les vivants, laissés pour l’avènement du Seigneur, nous ne devancerons pas ceux qui se sont endormis. Car, au signal donné, à la voix de l’archange, au son de la trompette divine, le Seigneur lui-même descendra du ciel, et ceux qui sont morts dans le Christ ressusciteront d’abord. Puis nous, qui vivons, qui sommes restés, nous serons emportés avec eux sur les nuées à la rencontre du Seigneur dans les airs, et ainsi nous serons pour toujours avec le Seigneur.» (1Thes.4:13-17).
«Ceux qui se sont endormis en Jésus», ce sont ceux qui se sont endormis avec la foi en Christ, et Dieu les emmènera Lui-même là où Il est. Dites-moi, seraient-ils rares parmi nous, ne sont-ils pas la grande majorité, les pécheurs, ceux qui n’ont pas encore eu le temps de laver leurs œuvres pécheresses avec des larmes de repentir? C’est la grande majorité, et l’Apôtre Paul dit qu’ils ne s’affligent pas, car Dieu peut les emmener avec Lui à cause de leur foi en Jésus. Et que, dans la vie future, dans la vie outre tombe, avant le Jugement Dernier, les péchés peuvent être pardonnés à ceux qui n’ont pas eu le temps de produire les fruits dignes du repentir. N’en trouve-t-on pas un témoignage direct dans les paroles du Christ: «C’est pourquoi je vous dis : Tout péché et tout blasphème sera remis aux hommes ; mais le blasphème contre l’Esprit ne leur sera pas remis. Et quiconque aura parlé contre le Fils de l’homme, on le lui remettra ; mais à celui qui aura parlé contre l’Esprit-Saint, on ne le lui remettra ni dans ce siècle, ni dans le siècle à venir.» (Mat.12;31-32). Dieu ne pardonnera pas le blasphème contre l’Esprit-Saint, ni en ce siècle, ni dans le siècle à venir. Mais s’il en est ainsi, si dans le siècle à venir, dans la vie outre-tombe, il est possible d’obtenir le pardon de péchés moindres que le blasphème contre l’Esprit-Saint, cela signifie que nous devons croire que le sort de nos proches qui se sont endormis tout en étant chargés d’impuretés, de beaucoup de péchés, peut être allégé car Dieu est miséricordieux, tous sont aimés par Dieu. La même pensée est contenue dans d’autres paroles de notre Seigneur Jésus Christ : «Ne craignez pas ceux qui tuent le corps, et qui après cela ne peuvent rien faire de plus. Je vais vous apprendre qui vous devez craindre : craignez celui qui, après avoir tué, a le pouvoir de jeter dans la géhenne ; oui, je vous le dis, craignez celui-là.»(Lc12;4-5) Le Christ n’a pas dit qu’il fallait craindre celui qui après la mort jette le corps dans la géhenne. Il a dit «celui qui a le pouvoir de jeter dans la géhenne». Le corps peut donc être jeté, mais il peut aussi être épargné. Luther et les sectateurs fondent leur rejet de la commémoration des défunts sur les paroles de la Sainte Écriture qui affirmeraient que chacun recevra exactement selon ses mérites. «Car nous tous, il nous faut comparaître devant le tribunal du Christ, afin que chacun reçoive ce qu’il a mérité étant dans son corps, selon ses œuvres, soit bien, soit mal»(2Cor.5;10). Ils affirment que ce passage dit clairement que chacun recevra selon ses mérites, et pourquoi donc prier si on reçoit selon ses mérites? Mais ce passage ne parle pas du tout du jugement qui sera prononcé lors du Jugement Dernier. Il parle du jugement provisoire prononcé sur chaque défunt lors de sa mort, et qui peut être très différent de celui du Jugement Dernier. Les luthériens et les sectateurs disent ce que disaient les anciens hérétiques : «S’il était vrai que la prière allège le sort des défunts, alors tout le monde serait sauvé». Quelle malice dans ces mots. Comme si cela leur était désagréable, que tous soient sauvés!
Mais c’est agréable à Dieu. Le Seigneur ne souhaite la perte d’aucun homme. Dieu veut que tous soient sauvés. Et s’il est possible d’alléger le sort de nos proches qui se sont endormis par des offrandes pour eux, cela ne procurera-t-il pas de la joie à Dieu, à nous et aux anges de Dieu? Seul l’ennemi du genre humain ne veut pas le salut des hommes. Dieu veut les sauver tous. Mais à celui qui nie qu’il faille prier pour les défunts, cela lui est désagréable, comme s’il ne voulait pas que tous soient sauvé. Ils se basent sur les paroles du psaume : «qui te louera dans le schéol?»(Ps.6;6). Ils disent que c’est une indication certaine du Psalmiste qu’en enfer on ne peut plus se confesser. Oui, se confesser dans le sens où on le fait quand on vit sur terre, c’est réellement impossible, car quelle est la vraie confession qui lave nos péchés? C’est cette confession qui, après la confession des péchés devant le prêtre, fixe pour tâche obligatoire de corriger son chemin, de s’éloigner du chemin du péché, de ne pas répéter le péché duquel on s’est repenti. Une telle confession est impossible pour les morts, car tout est fini: la vie ne peut plus être changée, car cette vie n’est plus. Nos frères malheureux, qui sont morts dans les péchés et qui se sont présentés devant Dieu lors du jugement préliminaire, souffrent, pleurent et regrettent de ne pas avoir produit les fruits dignes du repentir durant leur vie. Leurs soupirs, leurs afflictions, leurs remords, bien sûr, ils peuvent les adresser à Dieu. Aidons-les donc par nos prières pour eux, car la prière pour eux exprime notre amour pour eux, et l’amour est une force toue puissante et irrésistible. L’amour vient de Dieu, l’amour ne cesse jamais, et tout don d’amour, et toute prière d’amour pour nos proches endormis, et toute offrande d’amour pour eux sont agréables à Dieu, comme toutes les manifestations de l’amour Lui sont agréables. Nous devons donc continuer à prier constamment pour nos morts. Pour tous? Non, pas tous. La Sainte Église indique qu’il y a des pécheurs pour lesquels on ne peut pas prier, et il ne faut pas: ce sont ceux qui sont morts dans l’endurcissement contre Dieu, contre le Christ, qui sont morts dans l’incrédulité, qui ont commis de graves péchés. Saint Jean le Théologien écrit à leur sujet: «Si quelqu’un voit son frère commettre un péché qui ne va pas à la mort, qu’il prie, et Dieu donnera la vie à ce frère, [à tous ceux dont le péché ne va pas à la mort]. Il y a tel péché qui va à la mort ; ce n’est point pour ce péché-là que je dis de prier»(1Jean 5;16). Celui qui a commis des péchés mortels ou des péchés qui ne seront pas remis dans cette vie ni dans la vie future, qui a blasphémé contre Dieu, nié Son existence, bafoué Sa loi, on ne peut alléger son sort dans la vie outre-tombe.
Il existe encore d’autres moyens très efficaces d’alléger le sort des morts. La Sainte Église depuis les temps anciens attache une grande importance à toutes les œuvres de charité accomplies en mémoire des défunts. Et l’Église attache la plus grande importance à la commémoration des défunts lors de la célébration de la liturgie, lorsque pendant la Proscomédie, les parcelles sont extraites pour les défunts, et à la fin de la liturgie, quand elles tombent dans la Coupe du Sang du Christ, et le prêtre dit: «Remets, Seigneur, les péchés de ceux qui ont été commémorés ici, par Ton Sang Très Pur, et par les prières de Tes saints.» Le Sang du Christ serait donc impuissant? Les péchés de ceux que nous commémorons ne seraient-ils pas lavés?
Rappelez-vous ces moyens essentiels, rappelez-vous que la prière pour le repos des âmes de vos proches qui se sont endormis est très importante, rappelez-vous que vous devez faire de bonnes œuvres, des œuvres de miséricorde, des œuvres d’amour en leur mémoire.
De tels œuvres, chacun de vous en a beaucoup à faire, voyez vous-même, vous trouverez vous-même. Mais je vais vous indiquer une chose par laquelle vous pouvez alléger le sort de vos proches endormis. Vous avez entendu l’appel du recteur à manifester de l’amour chrétien à ces malheureux petits enfants qui sont tous abandonnés. Vous savez combien d’orphelins ont eu leurs parents tués pendant la guerre. Vous savez que notre gouvernement organise pour eux un orphelinat et une maison d’accueil des bébés, mais il y a tellement d’orphelins qu’on n’a pas le temps d’organiser tout pour tous ces petits, il y a encore beaucoup de petiots que vous rencontrerez dans les rues et les gares.
Ceux qui sont placés dans des orphelinats vivent, pauvres, sans amour et affection maternels. Aujourd’hui, j’ai été très ému d’entendre que des femmes au bon cœur se sont rassemblées et sont allées les voir. Les petits enfants se sont précipités à leur rencontre en criant: «Maman, maman est venue!». Il est nécessaire que parmi vous, les chrétiennes, il y ait de telles mères. Il faut qu’il y ait de bonnes personnes qui prennent soin de ces enfants malheureux pas encore adoptés et placés dans des orphelinats, et même, peut-être, qu’elles les adoptent.Amen
Traduit du russe
Source 

Saint Païssios l’Athonite pendant la guerre

A ce jour, trois volumes des Paroles de Saint Païssios l’Athonite ont été traduits en français. Alors que les six volumes en grec ont été traduits en russe depuis des années. Le texte ci-dessous est la traduction d’un extrait du volume II L’Éveil Spirituel, dont la traduction russe a été publiée en 2001 aux Éditions Orthograph à Moscou. Le présent texte sera sans doute moins fidèle à la lettre de l’original grec que la traduction française officielle que nous attendons tous, mais malgré cela, les lecteurs francophones auront un avant-goût de ce que nous attendons tous et que la patience nous proposera dans plusieurs années peut-être, lors de la traduction de ce volume en français. Il s’agit d’un extrait du chapitre 3 de la quatrième partie, pages 206 à 209 de l’édition russe.

(…)Pour le Christ, je n’ai rien fait. Si j’avais fait pour le Christ dix pourcents de ce que j’ai fait pendant la guerre, aujourd’hui, je ferais des miracles ! Voilà pourquoi, dans ma vie de moine je dis «A l’armée, quel martyr j’ai enduré pour la Patrie! Mais après qu’ai-je fait pour le Christ?». En d’autres mots, par comparaison au martyre que j’ai enduré à l’armée, dans ma vie de moine, je me sens comme le fils du roi ! Cela ne fait pas de différence que j’aie du sucre ou non. Parce qu’alors, pendant les opérations, quel jeûne on devait supporter! On mangeait la neige! Certains se risquaient aux alentours pour essayer de trouver quelque chose de comestible, mais moi, je devais surveiller les rations, je ne pouvais pas m’en éloigner. Une fois, nous sommes restés treize jours sans nourriture, juste une part de pain et un demi hareng par homme. Je buvais l’eau dans les traces des sabots, et pas de l’eau de pluie pure, de l’eau mélangée à de la boue. Un jour, il m’est arrivé de devoir goûter de la «limonade»! Ce jour-là, je me suis éloigné et j’ai trouvé des traces de sabots, remplies d’eau. Jaune. Et j’en ai bu encore et encore!… C’est pourquoi plus tard, au cours de ma vie monastique, l’eau m’a toujours semblé être une grande bénédiction, même quand elle était pleine d’insectes. Au moins elle ressemblait à de l’eau.
Un soir, on constata que le câble de liaison avait été coupé. C’était en décembre 1948. Partout, de la neige. Des congères. A quatre heures de l’après-midi, on nous donne un ordre : aller jusqu’au village, à deux heures de marche, rétablir la connexion, et revenir. Deux heures plus tard, la nuit allait tomber. Les soldats étaient déjà morts de fatigue. Ils n’avaient pas le courage d’y aller. Et comment retrouver là-bas le câble rompu, en dessous des congères?
Eh quoi, Geronda, vous ne connaissiez pas le chemin, ni le trajet du câble?
Ehhh, le chemin, je le connaissais très bien, mais la nuit allait nous tomber dessus en cours de route. Bref, on me donna quelques hommes, et on se mit en marche. Au début, on se trouvait encore dans le périmètre du camp, et on déblayait la neige du chemin avec des pelles, pour rassurer le commandant et on avançait un peu seulement. Plus loin, je leur dit : «En avant, en avant, on n’est pas encore arrivés, et après on doit encore revenir!». Je suis passé devant parce que les autres n’arrêtaient pas de maugréer. Ils me disaient : «La Grèce, elle, ne peut pas mourir, mais nous, on peut bien mourir!». Et sans fin ils répétaient la même ritournelle. Nous progressions ainsi : je me laissais tomber dans la neige, ils me tiraient. Et je me jetais de nouveau dans la neige et ils me tiraient… J’avais un sabre et je m’en servais pour sonder un peu la neige devant moi pour trouver vers où avancer. Il fallait sans cesse tester. J’avançais en tête et je disais : «En avant, avançons, il n’y a pas de bétail qui passe de ce côté, ce n’est pas ici que le câble peut être endommagé. Nous devons atteindre l’un ou l’autre ravin où le câble pend en l’air, et là uniquement on testera». Finalement nous approchâmes du village devant lequel s’étageaient des terrasses cachées au regard par l’épaisseur de la neige. Je glissai dans la neige et me retrouvai sur une terrasse juste en-dessous. Les autres avaient peur d’avancer pour me tirer de là. Finalement, nous sommes descendus de terrasse en terrasse, comment, il vaut mieux ne pas en parler. Et tard le soir, nous sommes entrés dans le village. Dans un ravin d’un peu moins de deux mètres, je découvris la rupture du câble. Je le réparai et établis la liaison avec le commandant. «Maintenant, rentrez!» nous ordonna le commandant. Mais comment réussir à retourner là-bas? Non seulement la nuit était tombée, mais il fallait encore remonter toutes les terrasses. Et nous les avions descendues tête la première! Et comment retrouver le chemin? Je répondis au commandant : «Mais comment pourrions-nous rentrer? Descendre, nous y sommes parvenus tant bien que mal, mais comment remonter? Ce serait mieux de repartir demain matin, nous sortirons par l’autre côté du village et nous ferons le tour.» «Rien du tout! Vous rentrez aujourd’hui!», répliqua le commandant. Pour notre plus grand bonheur, cette conversation fut entendue par un adjudant qui demanda au commandant de nous autoriser à passer la nuit au village. Nous restâmes donc. Dans une maison, on nous donna deux ou trois couvre-lits en laine. Je me mis à frisonner. C’était bel et bien moi qui avait ouvert et déblayé le chemin. J’étais complètement trempé. Les camarades me plaignaient, j’en avait bavé plus qu’eux, alors, ils me placèrent au milieu du groupe. Nous avons alors soupé avec notre ration de pain seulement. Je ne me souviens pas avoir éprouvé une si grande joie de toute ma vie ultérieure.
Je vous ai raconté cette histoire pour que vous compreniez ce qu’est le sacrifice. Je n’ai pas raconté cela pour que vous me félicitiez, mais pour que vous compreniez d’où provient le joie véritable.
Par la suite, dans le peloton de liaison, les autres me roulaient dans la farine. «Mon père va arriver, je dois aller à sa rencontre, prends ma place pour la garde, s’il-te-plaît», me dit l’un. «Ma sœur va arriver», me dit un autre. Il n’avait pas de sœur, en réalité. Un autre devait aller éclaircir quelque chose, et j’acceptai de me sacrifier. Quand j’avais fini la garde, il fallait remettre de l’ordre. L’entrée des locaux de la section de liaison était interdites à ceux qui n’en faisaient pas partie, même aux officiers des autres services. On était en temps de guerre. Si bien qu’on ne pouvait bénéficier de l’aide de personnel de nettoyage. Je prenais le balai et nettoyais tous les locaux. C’est là que j’ai appris à balayer. Je disais : «Ici, nos locaux de service, c’est une sorte de lieu saint ; il est impossible d’en délaisser le nettoyage». Je n’étais pas obligé de balayer, et je ne savais comment m’y prendre ; à la maison, je n’avais jamais tenu de balai en main. Et si j’avais voulu le faire, ma sœur m’aurait arraché le balai des mains. Les copains plaisantaient à mon sujet : «La nettoyeuse, l’éternel sacrifié!» Mais je n’accordais aucune importance à cela. Je faisait cela non pour entendre «merci», mais parce que j’en sentais la nécessité et je m’en réjouissais.(…)
Traduit du russe

Source :  Преподобный Паисий Святогорец «Слова. Том II. Духовное пробуждение». Издательство:Орфограф, Москва. Pp. 206-209

Archimandrite Raphaël (Kareline) Le temps, l’Église, la mort, l’éternité.

Le texte suivant est composé de la traduction de deux passages du livre de l’Archimandrite Raphaël Kareline «A propos du temps, de la mort et de la vie éternelle», édité en 2019 à Moscou par la «Société ecclésio-historique». Les passage sont tirés des pages 36 à 40 et 42 à 45. Plusieurs textes de l’Archimandrite Raphaël, qui vit à Tbilissi, ont été traduits sur le présent blog.

(…) Les anciens ne sont pas parvenus à percer le secret du temps. Ils ne purent percer le secret de l’éternité, qui pour eux n’était qu’une sorte d’arrêt statique, une pause entre les cycles de l’histoire cosmique. C’est pourquoi le temps signifiait pour les anciens une situation désespérée, sans issue, semblable à un terrible serpent enserrant sa proie dans ses anneaux, jusqu’à la mort.
Mais l’Église maîtrise le mystère du temps ; il s’agit d’un mystère simple. Dieu a créé le temps en guise de préparation à l’éternité. Le temps n’est pas dépourvu de commencement, ni de fin ; il s’écoule sur fond d’éternité. Le temps est une situation de préparation et de choix, un carrefour des chemins, où se décide la question essentielle de l’existence humaine : «avec qui est l’homme?», avec Dieu ou sans Dieu. Le temps, c’est la possibilité de se transformer, de devenir une personne humaine, de manifester ou de perdre la ressemblance de Dieu, l’acquisition de ce qui va se déployer dans l’éternité. Ici sur terre, il s’agit d’un séjour, dans l’éternité, c’est la vraie existence. Le temps est un champ d’expérimentation pur l’homme,tandis que l’éternité est l’appartenance à Dieu, c’est pourquoi pour le Chrétien, le temps s’ouvre sur l’éternité, à travers la relation à la grâce primordiale, éternelle, incréée. Exprimé de façon imagée, l’éternité est comme la respiration de Dieu que l’âme peut ressentir, percevoir, pendant la prière. Pour l’incroyant, comme pour les anciens païens, le temps est juste le seuil de la mort, une existence en négatif, l’écrasement des espoirs humain. C’est pourquoi il ne reste aux incroyants qu’un seul moyen de lutter contre le temps et la mort: les oublier. Pour le Chrétien, le temps est un grand cadeau de Dieu. Et en même temps, une grande responsabilité, car l’éternité peut être aussi pour nous la perte définitive de Dieu. (…)
(…) Le temps s’autodétruit en permanence. Les anciens le représentaient sous forme du serpent qui engloutit sa propre queue. Le temps est l’attribut de l’existence relative. Dans le temps, il n’y a pas de passé, il a disparu sans retour. Dans le temps, il n’y a pas de futur, on peut seulement le supposer. Dans le temps, il n’y a pas de présent, c’est un rayon qui n’a ni longueur ni largeur, qui glisse continuellement du passé déjà perdu vers un futur qui n’existe pas encore. Alors que les organes de nos sens tente de fixer le temps en tant que présent, il est déjà passé, il s’est transformé en passé et la vague nous a balayé. Cela veut dire que le présent est seulement le souvenir d’un passé tout récent, le produit du conservatisme des organes de nos sens, qui font parvenir à nous un instant qui déjà n’est plus, et donc, le présent est uniquement la trace du passé et l’attente du futur.
La mort elle-même ne signifie pas sortir du temps. L’âme de l’homme passe simplement dans une situation caractérisée par une nouvelle acception du temps, qui nous est inconnue. Le temps disparaîtra quand le ciel et la terre brûleront dans un brasier cosmique qui ne détruira pas le monde mais le transfigurera. Jusqu’au Jugement Dernier, le temps régnera non seulement sur terre, mais aussi dans les Cieux et aux enfers. Les âmes des saints attendent la résurrection des corps et les âmes des pécheurs, la miséricorde de Dieu par les prières de l’Église et par les aumônes faites en leurs noms par ceux qui sur terre leur veulent du bien.
Le temps est le potentiel et la possibilité de la transformation. Il représente symboliquement le mouvement horizontal. L’éternité est un mouvement vertical ; en elle il n’y a aucune transformation ni passage d’un état à l’autre, en elle se déploie le contenu de l’âme humaine. Dans l’éternité, il n’y a pas cette perte d’existence que les philosophes nomment l’asymétrie du temps, il n’y a pas de périodes qui se succèdent. L’éternité n’est toutefois pas immobilité, ni statisme, mais mouvement, mais d’une autre nature que le mouvement du temps.
Le temps est unidimensionnel, l’éternité, multidimensionnelle. Ce n’est pas facile à comprendre. Prenons une surface, bidimensionnelle. Si elle reçoit une troisième dimension, elle devient volume. Il en va ainsi de l’éternité, pour le dire de façon figurée, ce qui était unidimensionnel devient multidimensionnel et l’homme, sans perdre le passé, élargit le présent, et dans ce présent s’ouvre sans cesse le nouveau, par le relation à la grâce, de nouveaux volumes d’existence, de nouvelles capacités de perception. Le temps, c’est la transformation, liée à une perte. L’éternité, c’est le nouveau, sans perte. L’éternité est la véritable existence alors que le temps est étape. Le temps ne passe pas vers éternité, ni l’éternité vers le temps. Le temps se déroule sur fond d’éternité. C’est une période de devenir, la période de gestation de l’éternité. L’Apocalypse dit que le temps cessera après le Jugement Dernier. (…)
Traduit du russe


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