Né en 1888, le Saint Hiéromartyr Nikon (Beliaev) fut hiéromoine à la Skite du Monastère d’Optina. Il en fut un des derniers startsy, ayant eu pour père spirituel Saint Barsanuphe, lui-même fils spirituel du Saint Starets Anatole (Zertsalov) d’Optina. Un récit de sa vie a été traduit en plusieurs parties sur le présent blogue et est accessible ici. Le Monastère a publié le journal tenu par le novice Nicolas pendant les trois premières années de sa vie monastique. (Дневник послушника Николая Беляева (преподобного Оптинского старца Никона). Le texte ci-dessous est la traduction (sur base de l’édition de 2016) des premières pages de cet ouvrage remarquable, inédit en français. Le début de la traduction se trouve ici.

22 avril
Aujourd’hui, j’ai reçu une lettre de maman, très courte. Elle nous félicite, nous bénit et rapporte qu’il y a eu une terrible inondation à Moscou, de sorte que dans de nombreuses églises, il n’y pas eu d’office le matin de la Semaine Lumineuse. Ici, j’apprends peu de choses qui se passent dans le monde, et ce qui me parvient, ce sont presque uniquement des horreurs, et d’une manière ou d’une autre, nous sommes heureux que le Seigneur nous ait fait sortir du monde, nous ait éloignés de ces horreurs.
Demain, on commémore le Saint Mégalomartyr George et le jour du Tsar. Il y a des vigiles au monastère. Les résidents de la Skite sont partis à la veillée, mais moi, je lis les Psaumes de 6 heures à 8 heures, et donc le Père m’a béni pour que je n’y aille pas. Donc, j’aurai un peu de temps libre et j’écrirai l’une ou l’autre chose.
J’ai travaillé hier et aujourd’hui dans le jardin, j’ai ratissé et transporté porté des feuilles pour fertiliser les groseilliers à maquereau.
Batiouchka m’a béni pour lire le volume deux d’Ignace Briantchaninov.
Batiouchka m’a désigné [avec] le Père Koukcha pour une obédience : composer un registre de tous les offices de l’église, différents des offices ordinaires, par exemple: l’Élévation de la Croix, les offices de la Semaine Sainte, etc.
Il s’avère qu’en l’absence d’un tel ouvrage, pendant ces offices particuliers, par méconnaissance, il y a des ralentissements, des confusions et même des omissions, et afin d’éviter tout cela, il est souhaitable d’avoir un livre particulier avec le déroulement précis de chaque office.
Je dois écrire à propos de la règle en cellule. Tout est lu en slavon d’église, et l’ordre de lecture est le suivant: d’abord deux cathismes avec toutes les prières et les métanies, puis deux chapitres de l’Apôtre, un chapitre de l’Évangile et le dyptique.
Je fais tout cela avec la bénédiction de Batiouchka entre la fin du repas et le début du thé. Il reste les cinq cents pour le soir de 9 à 10 heures, après la bénédiction avant le coucher.
Un jour, Batiouchka m’a dit:
– Après Pâques, je vais vous donner un cheval, et vous irez vous-même à Kozelsk (acheter ce qui est nécessaire pour moi).
– Mais pourquoi, Batiouchka? Je peine déjà à sortir de la Skite le matin pour aller au monastère.
Donc, cela veut dire que vous ferez un bon moine, dit Batiouchka, et il semble qu’il ait posé sa main sur mon front.
Alors je me suis dit: quelle est cette bizarrerie? Pourquoi Batiouchka me bénit-il pour sortir alors que je ne l’ai pas demandé? Et puis j’ai pensé que Batiouchka m’avait dit cela pour me tester.
Un jour de la sixième semaine du Carême, ce devait être le mercredi, Batiouchka est venu chez nous dans la cellule! Ivanouchka a fait chauffer le petit samovar, et nous avons bu du thé, et parlé plutôt de choses pratiques. Batiouchka a béni de laver et de nettoyer la cellule pour la fête, et qu’il devait toujours y faire propre et qu’il fallait la nettoyer régulièrement… «Par exemple, George, le reclus de Zadonsk occupait une cellule des plus simples, mais nulle part on ne voyait un seul grain de poussière.»

Saint Barsanuphe d’Optina

Ensuite, afin d’éviter les scrupules au sujet du sucre, ce qui se produit parfois avec Ivanouchka (Je suce un morceau de sucre de temps en temps seulement), Batiouchka a béni d’acheter des sucreries. «Ce n’est pas un péché, il suffit de connaître la mesure, mais certains, quand ils commencent, mangent la nourriture par kilos tombant dans l’excès; il est donc préférable de se surveiller et d’avoir des sucreries, mais avec mesure.»
Ensuite, nous avons abordé un peu le sens d’un psaume, sur une question d’Ivanouchka, puis Batiouchka a dit à propos de tous les livres de l’Ancien Testament que leur texte était falsifié. C’est arrivé comme ceci. [N.d.E. : La remarque signifiait que le texte de la Bible en russe moderne était déformé. La Bible en slavon d’église respecte scrupuleusement la traduction de la Septante.] «À la Résurrection du Christ, les Apôtres ont indiqué aux Juifs les prophéties à propos de Jésus-Christ, qui s’étaient accomplies, leur prouvant la vérité au moyen leurs propres livres. Alors les Juifs ont osé rayer et changer les passages qui se rapportaient au Christ et à sa Résurrection. Ainsi, ils ont déformé tous les livres. Mais le Seigneur voulait garder le texte des livres immuables pour tous les croyants ultérieurs. Quelques centaines d’années avant Jésus-Christ, le Roi Ptolémée souhaita traduire la Bible des Juifs en grec, dont l’usage était généralisé à l’époque. C’était, bien sûr, une volonté de la Providence Divine. À cette fin, il a appelé des érudits qui connaissaient bien les deux langues (le grec et l’hébreu) et leur a confié la traduction de la Bible. Ils l’ont traduite chacun séparément et ensuite tout fut vérifié ensemble. Ainsi fut formée la traduction des 70 traducteurs en grec, et nous avons en elle le vrai texte de la Bible. Vous avez abordé une question très importante.»
Cela venait du fait que nous avions commencé à examiner le psaume en russe, traduit du grec, et également une autre traduction en russe. Batiouchka a dit de plus que maintenant, pour les Juifs russes, les Juifs imprimaient et vendaient un texte déformé, pour les psaumes aussi. Maintenant, ces livres sont distribués par les libraires, et donc vous pouvez, pour ainsi dire, «vous fourvoyer» dans une telle affaire, ce qui, bien sûr, n’est pas souhaitable.
Le tome trois du livre d’Ignace Briantchaninov, je l’ai fini depuis longtemps. Maintenant, je lis à nouveau Saint Pierre Damascène et, si Dieu le veut, je commencerai Ignace Briantchaninov tome deux. Le tome trois je l’ai vraiment aimé. Comme je l’ai dit à Batiouchka, malgré le fait que j’ai généralement aimé le livre, il y a des endroits dans lesquels j’ai ressenti un certain doute, par exemple, les péages, ou encore: le Trône dans le Ciel, les ordres angéliques, le paradis, etc.
«Tout cela, répondit Batiouchka, doit être compris spirituellement; ce n’est qu’une allusion à la réalité même, et certains, ne comprenant pas que tout est dit ici dans un sens spirituel supérieur, tombent dans l’illusion. Par exemple, dans le ciel devant le Trône de Dieu, le voile s’écarta lorsque la Bienheureuse Théodora s’est approcha… Bien sûr, cela doit être compris dans un sens spirituel. Tout comme on dit que les Juifs avaient un voile devant les yeux, cela ne veut pas dire qu’il y avait vraiment un voile réel sur tous les Juifs. Ou on dit aussi à propos des Séraphins qu’ils couvrent leurs visages avec des ailes. Comment pourraient-ils avoir des ailes? Cela signifie qu’ils ne peuvent pas voir toute la gloire de Dieu… (A suivre)
Traduit du russe
Source :                       

Saint Père Nikon, prie Dieu pour nous.