Les miracles dont nous gratifie la Très Sainte Mère de Dieu sont innombrables, quotidiens. Le texte ci-dessous en rapporte deux. Il décrit aussi une tranche de vie, et notamment la conversion, d’un prêtre en Géorgie, l’Archiprêtre Théodore Koutsichvili. Le texte original russe a été préparé par Madame Olga Rojniova, et publié sur Pravoslavie.ru le 7 juin 2017.
Je suis né en 1964, aux temps de l’athéisme. Mon père était non-croyant, mais grand-père et grand-mère l’étaient. Ils avaient préservé leur foi et la maintenaient vivant à travers les années, les afflictions et toutes les épreuves qui furent leur lot. Un jour babouchka manqua de s’étouffer avec un gros pépin de kaki et tomba malade. On lui dit :
– Bois un peu de lait, ça passera.
– Je ne peux pas, c’est le carême, répondit-elle.
Grand-père respectait lui aussi le jeûne du carême et s’abstenait de viande et de lait, alors qu’à cette époque, rares étaient ceux qui jeûnaient. Il interdisait aussi à ses enfants de travailler le dimanche. Grand-père naquit en 1888 et mourut en 1982 ; il vécut 94 ans. Chaque soir, je l’ai vu se mettre en prière, prier et se signer, mais alors, je ne comprenais pas à quel sujet il priait et quelles étaient ses prières ? Je ne comprenais pas mais je m’en souviens, et j’ai gardé tout cela dans mon cœur.Quand j’eus terminé l’école, j’entrai à l’armée. J’ai fait mon service dans la région de Moscou, à Mitishchi: on y a construit un sanatorium et restauré l’Académie du Quartier Général. J’étais chauffeur du commandant. Après l’armée, je suis entré à la Faculté des Sciences économiques de l’Université de Tbilissi. Grand-père mourut et j’ai commencé à jeûner le mercredi en sa mémoire. Je souhaitais sincèrement honorer sa mémoire, bien que je ne comprenais encore rien à la foi. Ensuite, j’ai jeûné également le vendredi, mais à nouveau pas guidé par le foi. Il me semblait tout simplement que lorsque je m’imposais des restrictions, quand je me limitais volontairement dans certains domaines, les choses allaient mieux pour moi. Le dissimulais mon jeûne à mes camarades de cours. Et puis je commençai à aller à l’église, à faire brûler des cierges, mais comme avant, je ne comprenais rien à la vie spirituelle. Après avoir terminé l’université, j’ai travaillé comme économiste dans une entreprise, et souvent je passais devant l’église, rue de Sion. Je n’y priais pas, j’y allumais juste un cierge. C’était l’époque où partout s’ouvraient des églises fermées à l’époque du pouvoir soviétique, mais les gens les fréquentaient peu ; ils s’étaient déshabitués des offices à l’église. Un jour, j’ai entendu une homélie du Patriarche. Elle me toucha fortement dans l’âme. Je ne savais pas même qui était le Patriarche-Catholicos Élie II, mais son homélie m’impressionna immensément. Je commençai à fréquenter la cathédrale rue de Sion, afin d’entendre encore les homélies de cet homme.
La Cathédrale de la Dormition, ou Cathédrale de Sion, est une très ancienne église. On l’appelle ainsi en l’honneur du Mont Sion. Une église fut construite en ce lieu dès le VIe siècle. En 1226, le Shah de Khorezm prit Tbilissi et voulut convertir le peuple à l’islam. Il ordonna de retirer la coupole de l’église, d’y installer un trône, d’en enlever les icônes et de les jeter du haut du Pont de Métékhi. Depuis le trône, le Shah observa les habitants de Tbilissi qu’on amenait sur le pont et auxquels on promettait la liberté s’ils profanaient les saintes icônes en les piétinant. Et l’un après l’autre, les habitants de Tbilissi, vieillards, femmes et enfants, préférèrent la mort en martyr. On les décapitait et les jetait dans la rivière Koura dont l’eau devint rouge du sang de cent mille martyrs. Les siècles s’écoulèrent, l’église subit de nombreuses destructions et se releva chaque fois de ses ruines et de ses cendres. On y conserve de grands trésors sacrés : le chef du Saint Apôtre Thomas, l’icône miraculeuse de la Très Sainte Mère de Dieu de Sion et la croix de Sainte Nina, égale-aux-apôtres, croix faite de sarments de vigne noués avec les cheveux de la Sainte elle-même.
Un jour je suis arrivé à Sion et je vis le prêtre sortir avec la Coupe. Une file se forma et je m’y insérai. A cette époque, je ne savais pas ce qu’était la Sainte Communion. Quand mon tour arriva, le prêtre me demanda : «Vous êtes-vous confessé?». Je lui répondis que je ne savais pas ce qu’était la confession. Il ne me donna pas les Saints Dons mais me proposa de rester après la liturgie pour parler avec lui. Je restai donc et attendis, longtemps, et il ne sortit pas. Je décidai de ne plus attendre et je quittai les lieux. Quelques mois s’écoulèrent. J’avais une forte envie de m’entretenir ouvertement avec ce prêtre. Je ne sais pas ce qu’était la confession mais je voulais ouvrir mon âme. J’arrivai devant Sion et regardai, le prêtre descendait les marches de l’église avec sa matouchka. J’étais en voiture et je leur proposai de les embarquer et de les reconduire chez eux. C’était l’Archiprêtre Nicolas (petit-fils du Métropolite Constantin Melikidzé), mais alors, je ne savais rien de tout cela. Ce prêtre avait juste touché mon âme. Plus tard, je vis à nouveau à l’église mais je ne le vis pas. Je sortis décontenancé, regardai autour de moi et aperçus qu’il sortait à ma suite. Je me réjouis comme un naufragé qui de son île déserte aperçoit un navire… Je le reconduisis une fois encore chez lui. Il me donna un Évangile, un livre de prières, et il devint mon père spirituel. Je me suis marié, nous avons eu des enfants, aujourd’hui, j’en ai quatre et trois petits-enfants.J’ai commencé à emmener ma famille à l’église. Nous avons appris à nous confesser et à communier. Le Père Nicolas a baptisé mon deuxième enfant, ensuite il fut envoyé à Thessalonique pour s’y occuper d’une paroisse. Je me tournai vers son frère Acace, aujourd’hui recteur de l’église de Metekhi, pour qu’il me guide spirituellement.
Les difficultés de la vie à l’époque nous firent quitter Tbilissi. Nous rejoignîmes mon père au village. La vie y était moins dure grâce aux potagers et aux animaux. Chaque fin de semaine, je parcourais les 160 km jusqu’à Tbilissi pour aller à l’office et pour parler à mon père spirituel. Les temps étaient durs. J’avais mon travail et j’aidais à l’église. Je finis par devenir sacristain et puis, lecteur. Je commençais à ressentir une dualité en mois et je voulus décider quel chemin suivre. Je demandai à papa : «Je ne sais quel chemin choisir. Peut-être devrais-je emmener ma famille à l’étranger?». Et mon père, ancien athée converti, me répondit, à mon grand étonnement : «Entre à l’Église, tu serviras les gens et tu serviras Dieu». Je décidai alors de discuter de mon avenir avec le Père Acace. J’entrai à l’église et vis Jacob, le lecteur. Je lui demandai où était le Père Acace. «Il n’est pas encore arrivé. Que lui veux-tu?». «Eh bien je veux lui demander comment sur quel chemin je dois poursuivre ma vie, travailler pour l’Église ou dans le monde.»
Batiouchka arriva, entra à l’autel. Je le suivis. Il pria puis se retourna vers moi et me demanda :
– Eh quoi, tu as appris l’ancien géorgien?
– J’ai appris Batiouchka, enfin j’essaie.
– Alors, on va t’ordonner.
Je sortis de l’autel, terriblement pâle. Jacob me regarda et décida d’entrer lui-aussi dans l’autel près du Père Acace. Il lisait mieux que moi l’ancien géorgien. Il demanda au Père Accace :
– Batiouchka comment dois-je poursuivre ma vie?
– Qu’as-tu étudié ?
– La stomatologie.
– Eh bien, poursuis ces études, on a besoin de bons stomatologues.
Jacob sortit de l’autel avec une telle colère…
Aujourd’hui, le Père Acace est un prêtre très renommé dans toute la Géorgie. Quand il me proposa d’être ordonné, le recteur de l’église était le Père Élisée. En 1997, celui-ci reçut l’ordination épiscopale. Et Vladika Élisée m’emmena auprès de Sa Sainteté le Patriarche pour demander de bénir mon ordination diaconale. Vladika fut envoyé servir à la Cathédrale historique de Nikortsminda dans la région de Ratcha. Et il m’emmena dans ses bagages. Je n’étais pas encore ordonné, j’étais juste servant d’autel et j’aidais Vladika. C’était très compliqué car mon épouse et mes quatre enfants demeuraient dans une région tout à fait différente de Géorgie. Alors, Vladika Élisée décida de me transférer à Lagodekhi, dans cette région où vivait ma famille, auprès du Métropolite Serge de Nekresi. Une semaine après mon arrivée à Lagodekhi, Vladika Serge m’ordonna diacre et, lors de la fête de l’Annonciation, prêtre. C’était en 1998.
Vladika Serge se trouvait dans une situation compliquée. Il fallait restaurer la cathédrale, fermée du temps des autorités soviétiques. L’éparchie ne comptait aucun monastère, les églises étaient détruites partout, et dans la résidence de Vladika lui-même, il n’y avait pas de vitres aux fenêtres ; les ouvertures étaient obturées par un film plastique. Il gelait à pierre fendre en hiver, tout le monde se rassemblait autour de l’unique poêle pour se réchauffer.
L’église dont je suis maintenant le recteur servit longtemps de cinéma et d’entrepôt pour parachutes militaires. Le lieu de l’autel actuel était le bureau de la direction. Vladika Serge me bénit pour que je sois recteur, mais l’église était complètement détruite, il n’en restait rien. J’ai commencé par célébrer chaque mercredi un moleben à l’icône miraculeuse de la Très Sainte Mère de Dieu de Kazan. Et que pensez-vous qu’il se passa? L’aide nous fut envoyée! Des bienfaiteurs apparurent de façon tout à fait impromptue, et ils offrirent d’importantes sommes d’argent pour la reconstruction de l’église. Quand nous eûmes épuisé quasiment toute cette réserve d’argent, je me rendis auprès de Vladika Serge pour demander un complément. Je m’adressai à la banque, et là, on m’informa de ce que quelqu’un venait juste de verser une somme inattendue sur notre compte, aussi importante que celle reçue initialement. Je sortis de la banque, le visage blanc comme de la farine et dit :
– Vladika, il y a de l’argent !
Je précisai la somme et lui aussi fut stupéfait. Il s’avéra que le maire de la ville avait remercié nos bienfaiteurs et ceux-ci avaient décidé de renouveler leur don. Ils avaient notre numéro de compte et il leur avait suffit de transférer cette grosse somme d’argent. Celle-ci nous suffit pour mener à bien la reconstruction complète de notre superbe église. Elle avait été construite au XIXe siècle pour le régiment des grenadiers russes qui était caserné ici. Pour la Géorgie, c’était une église de très grande taille.
Un ouvrier travaillait dans notre église. Il souffrait d’une vue très déficiente et portait deux paires de lunettes. Vladika Serge lui dit :
-Va demander l’aide de la Très Saine Mère de Dieu. Elle t’aidera! Il s’avança vers notre icône de la Très Sainte Mère de Dieu de Kazan, pria, et sa vue s’améliora, un peu. Chacun des jours suivants, elle devint meilleure et après deux mois, il n’eut plus besoin de lunettes.
– Une dame qui étudia en même temps que moi vit à Kobouleti. Son couple demeura stérile pendant cinq ans. Un jour, ils vinrent chez nous à Lagodekhi. Je célébrai un moleben devant notre icône miraculeuse de la Très Sainte Mère de Dieu de Kazan, et leur fils naquit moins d’un an plus tard. Cette dame avait constamment l’intention de venir à nouveau chez nous pour faire célébrer un moleben d’action de grâce, mais ses obligations familiales l’empêchaient toujours de trouver le temps de venir. Son fils avait déjà atteint l’âge de dix ans et elle n’avait pas encore trouvé le temps de remercier le Seigneur. Ainsi, un jour, le fils tomba de la voiture et se fractura une jambe. Ils me téléphonèrent immédiatement :
– Priez, sil-vous-plaît !
J’ai prié et lorsqu’on enleva le plâtre de la jambe du fils, toute la famille vint et nous célébrâmes le moleben d’action de grâce.
De toutes les villes de Géorgie des gens viennent chez nous chercher de l’huile de la lampe de notre icône miraculeuse de la Très Sainte Mère de Dieu, et nombreux sont ceux qui guérissent de leurs maux. Un jour arriva un pèlerin de l’Ouest de la Géorgie. Il pria devant notre icône miraculeuse. Je ne sais pas ce qu’il demanda à la Très Sainte Mère de Dieu, mais je sais qu’Elle l’aida. Rempli d’une joie immense, il voulut nous remettre dix mille dollars, mis je refusai l’argent et lui dit : «Achète plutôt quelque chose pour l’église, ce que tu veux». Et il acheta quatre grands lustres, un analoï, le porte-cierges spécifiques pour les âmes qui sont parties vers le Seigneur et des porte-cierges normaux. Vous pouvez encore voir toutes ces superbes choses dans l’église aujourd’hui.
Avec la bénédiction de Vladika Serge, je célèbre la liturgie quotidiennement dans notre église. Beaucoup de gens y participent, les gens accourent vers Dieu. Beaucoup de jeunes. Chaque mercredi, je célèbre un moleben et chaque vendredi, l’acathiste à l’icône de la Très Sainte Mère de Dieu de Kazan.
La Très Sainte Mère de Dieu nous protège.
Traduit du russe
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