Geronda Gabriel est l’un des ‘anciens’ athonites contemporains les plus connus. Depuis de nombreuses années, il mène son exploit ascétique dans la kelia de Saint Christodoulos, près de la capitale de l’Athos, Kariès. Il est impossible de dénombrer les pèlerins qui s’efforcent de rencontrer Geronda. Le site Pravoslavie.ru a publié le 1er avril 2014 un entretien qui se déroula entre Geronda Gabriel , et un des auteurs du site lors d’un pèlerinage à la Sainte Montagne.
Geronda, partout nous voyons s’effondrer des fondements qui au cours des millénaires paraissaient inébranlables. Plus que tout, c’est la chute des valeurs familiales qui suscite l’inquiétude. Comment les Chrétiens d’aujourd’hui peuvent-ils élever des enfants dans de telles circonstances ?
Il faudrait que les parents donnent des conseils à leurs enfants seulement de façon limitée. Donner sans cesse des conseils est une grande erreur pédagogique. Les enfants n’ont pas besoins de conseils ; ils ont besoins de bons exemples à imiter. Les enfants se bouchent les oreilles et dirigent leur regard vers leurs parents : ils observent leurs bonnes actions. Celui qui donne un bon conseil construit avec une seule main, mais celui qui donne un bon conseil ainsi que le bon exemple, il construit à deux mains. Celui qui donne de bons conseils et de mauvais exemples, construit d’une main et détruit sa maison de l’autre. Lorsque par mon bon exemple j’essaie de corriger mon frère, je le corrige et je m’aide moi-même. Si je m’efforce de corriger mon frère sans donner le bon exemple, seulement par des mots, je besogne en vain. Autour de nous se répand une atmosphère spirituelle que l’on ne distingue pas au son, mais que les yeux voient. Nous n’éduquons pas nos enfants à travers ce que nous voulons, ou ce que nous savons, mais à travers ce que nous sommes.
Un prêtre adressa un jour le message suivant aux enseignants des différents niveaux d’une école, au seuil de l’année scolaire : «Chers professeurs, je vous affirme que ce que nous avons de plus précieux, ce sont nos enfants. Bien sûr, vous le savez, et vous vous demandez ce que je peux bien vous annoncer de neuf à ce propos. Nous n’enseignons pas à nos enfants ce que nous voulons, ce que nous savons, mais ce que nous sommes nous-mêmes. Si nos enfants nous surprennent à mentir, s’ils voient que nous dormons et restons à la maison au lieu d’aller à l’église le dimanche, si sous leurs yeux nous nous querellons avec leur mère, s’ils voient que nous accomplissons des choses inconvenantes, alors il ne fait aucun doute que nous tomberons bien bas à leurs yeux et nous n’obtiendrons aucun résultat, et quand ils deviendront indépendants, ils nous mépriseront». Un jeune homme m’a raconté qu’un jour, alors qu’il était un petit enfant, un nécessiteux vint frapper à la porte de la maison et demanda l’aumône.«Mon père lui fit l’aumône et à mes yeux, mon père devint très grand», m’expliqua-t-il. Les parents qui vont à l’église, jeûnent, prient, étudient les Saintes Écritures et s’exercent aux vertus et à l’amour du prochain donnent le bon exemple à leurs enfants. Ils peuvent entretenir l’espoir de ne pas voir leurs enfants tomber dans les filets du diable.
Comment ne pas se décourager en voyant que les États se délitent et que l’on cultive la débauche?
Nous devons étudier l’Écriture Sainte afin de renforcer notre foi et notre espérance. Il n’existe pas sur toute la planète un seul supermarché dans lequel on peut aller acheter un kilogramme de foi, un kilogramme d’espérance ou d’amour ou d’une autre vertu. Cela ne s’achète pas. Nous ne parviendrons à acquérir la foi qu’en lisant l’Évangile, en priant, en nous confessant, en communiant et en observant le jeûne. Personne ne doit se décourager pour quelque raison que ce soit, jamais. Les Saintes Écritures nous fournissent de nombreux exemples d’hommes tombés très bas et qui reçurent l’aide de Dieu et se repentirent de leurs actes.
On a l’impression que le monde s’approche à grande vitesse de sa fin.
Les Saints disent qu’il y aura une troisième guerre mondiale. Nous connaissons à ce propos les écrits de Saint Laurent de Tchernigov, ce saint de Russie qui jouissait de nombreux dons spirituels ; il décéda en 1950. Il disait qu’il y aurait une troisième guerre mondiale. Quand ? Cela, il ne le précisait pas, mais il affirmait qu’elle ne serait pas permise pour susciter le repentir, mais pour exterminer l’humanité. On demanda un jour à Einstein, le grand savant du siècle dernier, à quoi ressemblerait la troisième guerre mondiale. Il répondit qu’il n’en savait rien, mais que la quatrième serait menée à l’aide de bâtons et de pierres. La destruction de la terre serait tellement terrifiante que les gens retourneront à l’époque où ils ne connaissaient pas le métal et utilisaient les pierres comme armes.
Seul le repentir pourra sauver l’humanité ; sans lui personne ne sera sauvé. Si nous ne nous repentons pas, nous arriverons à une catastrophe générale.
De nombreux pèlerins venant de tous horizons arrivent à la Sainte Montagne. Quels sont les problèmes spirituels qui sont les plus répandus de nos jours parmi les Chrétiens Orthodoxes? Et comment lutter contre ces problèmes?
Les problèmes fondamentaux, ce sont la perte de l’emploi, la division des familles, les divorces, l’utilisation de la drogue par les enfants. Tout cela, c’est la conséquence du péché. Si nous essayions de vivre selon les Commandements de Dieu, Il ne nous enverrais pas toutes ces calamités. Dieu nous aime, et Il ne souhaite pas que l’humanité se batte, Il ne veut pas que nous souffrions. Dieu ne veut surtout pas que nous allions en enfer. Le Seigneur veut que tous soient sauvés et entrent dans la vérité. Dieu se réjouit du pécheur qui se repent ; Il le prend dans Ses bras et l’accepte auprès de Lui.
Les Chrétiens doivent-ils aimer leur Patrie terrestre? Existe-t-il une contradiction en ce qu’on aime à la fois la Grèce et la Jérusalem Céleste?
Aimer sa Patrie terrestre ? Oui évidemment ! Nous vivons chacun dans notre patrie et nous devons nous intéresser à sa prospérité. Sans préparation, il n’est pas possible d’atteindre la Jérusalem Céleste. D’un autre côté, il est nécessaire de prier le Seigneur de nous donner la Grâce de L’aimer de tout notre cœur et de toutes les forces de notre âme et de notre cœur, et notre prochain comme nous-mêmes. Nous devons élargir notre cœur pour y accueillir tout le monde. Tous les gens sur cette planète, nous devons les considérer comme nos frères et nos sœurs, comme des enfants de Dieu et des images de Dieu. Nous tous frères et sœurs avons un seul Père Céleste. Il ne faut pas être chauvin et n’aimer que son propre peuple, et il ne faut pas souhaiter du mal aux autres peuples. Les États forts doivent protéger les plus faibles. Notre Église interdit la guerre au fondement nationaliste, mais elle la bénit quand le danger menace la Patrie.
Parlez-nous, s’il-vous-plaît de vos rencontres avec Geronda Païssios.
Oui, je connaissais personnellement Geronda Païssios, mais nous ne nous fréquentions guère. D’autres pères, qui vivent aux alentours, entretenaient des contacts plus étroits avec lui. Il est saint, cela ne fait aucun doute. C’était un grand ascète de notre époque. C’était un modèle du monachisme des temps anciens.
Avez-vous connu Geronda Porphyrios que l’on vient de canoniser ? Si vous l’avez connu, parlez-nous de lui. Dans notre pays, certains désapprouvent ses enseignements, affirment qu’il faisait peu de cas du repentir et était quasiment dans l’illusion. Que leur répondriez-vous?
Oui, j’ai très bien connu Saint Porphyrios. L’Église l’a glorifié et a témoigné de ce que toutes les accusations soulevées à son égard sont infondées. Le Père Chrysostome du Saint Monastère de Koutloumoussiou raconte que lorsque Geronda Porphyrios parlait de l’amour envers Dieu, il vous disait que l’amour, le repentir et l’humilité devaient former un ensemble. Sans l’humilité, il ne peut y avoir de véritable amour pour Dieu. Saint Porphyrios avait le don de clairvoyance, un amour sans borne pour les gens ; il leur a consacré toute sa vie. Il recevait une multitude de gens pour la confession. Il les conseillait et priait pour eux. Il s’est tout entier, vraiment tout entier consacré au service du prochain.
Que souhaitez-vous à ceux qui en Russie liront cet entretien?
Je souhaite que la bénédiction divine soit sur le peuple russe en cette vie et dans la vie future. Je souhaite que ceux qui dirigent la Russie n’adoptent pas de lois qui viendraient à contredire les Commandements de Dieu.
Je souhaite que soient prises des mesures permettant de mettre un arrêt à la dépravation de l’homme, à la division des familles, des mesures interdisant l’avortement et les relations libres en dehors des liens du mariage, interdisant les unions homosexuelles, les mariages civils et la crémation.
Je souhaite que dans les écoles ne soit pas interdit l’enseignement de la Loi divine. Je souhaite que ne soient pas inventées des lois s’opposant à la Loi de Dieu car autrement, tous les malheurs que le peuple russe endura à l’époque de Lénine et de Staline se répéteront avec une force nouvelle. Je souhaite que ceux qui dirigent le peuple ne perdent pas de vue qu’ils dirigent des hommes et non du bétail. Dieu leur demandera des comptes sur la manière dont ils auront fait usage du pouvoir qui leur a été confié. Je souhaite que le Seigneur confère aux dirigeants de la Russie les dons du Saint Esprit : un esprit de Sagesse et de Raison, de Conscience et de Force, de Conduite pieuse et de Crainte de Dieu. Je souhaite au peuple russe de faire preuve d’un zèle courageux, alors, Dieu l’aidera à accéder au Royaume de Dieu, dans le Sein d’Abraham, avec Isaac, Jacob et tous les Saints.
Traduit du russe.
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