Né en 1888, le Saint Hiéromartyr Nikon (Beliaev) fut hiéromoine à la Skite du Monastère d’Optina. Il en fut un des derniers startsy, ayant eu pour père spirituel Saint Barsanuphe, lui-même fils spirituel du Saint Starets Anatole (Zertsalov) d’Optina. Un récit de sa vie a été traduit en plusieurs parties sur le présent blogue et est accessible ici. Le Monastère a publié le journal tenu par le novice Nicolas pendant les trois premières années de sa vie monastique. (Дневник послушника Николая Беляева (преподобного Оптинского старца Никона). Le texte ci-dessous est la traduction (sur base de l’édition de 2016) des premières pages de cet ouvrage remarquable, inédit en français. Le début de la traduction se trouve ici.
12 janvier
Aujourd’hui, samedi, je ne peux écrire car je commence mon obédience. Hier, j’ai écrit une lettre pour Batiouchka. Aujourd’hui, le Père Archimandrite m’a donné une nouvelle obédience: la réédition du premier tome du recueil des lettres du Père Ambroise. Il m’a demandé d’y travailler, et plus précisément, de concevoir et rédiger une liste reprenant brièvement le contenu de chaque lettre. C’est une obédience considérable. Cela prend beaucoup de temps. Jusque maintenant, je me sens bien. Gloire à Dieu, si patient devant mes péchés.
13 janvier
Aujourd’hui, je suis allé à la Liturgie et aux Vêpres, le reste du temps, j’ai lu la biographie du Starets le Père Macaire. Quel homme! Si je pouvais au moins, moi, pécheur, un peu lui ressembler. J’ai terminé toute la biographie, et maintenant j’en ai probablement, pour assez longtemps sans pouvoir lire. Batiouchka a béni que demain, si Dieu me prête vie, je commence l’obédience, et abandonne toute autre lecture. Aujourd’hui, j’ai une heure de temps libre, je vais essayer de me souvenir du contenu des conversations de Batiouchka.
«L’obéissance est plus importante que le jeûne et la prière, a dit Batiouchka, ne soyez pas troublé si vous arrivez en retard ou même si vous manquez complètement l’office à l’église.
Dévoilez toutes vos pensées, en particulier celles qui vous poursuivent longtemps.
Il est nécessaire d’avancer progressivement dans la vie monastique, c’est la science des sciences. Comme on avance dans toute science, il aussi nécessaire d’apprendre sous la direction de quelqu’un de plus ou moins expérimenté dans cette science; il est donc nécessaire de s’accrocher à son starets. Et de s’adresser à lui seul, car autrement une séparation spirituelle peut survenir.
Tout un chacun commence par apprendre l’alphabet, mémorisant progressivement lettre par lettre. Vous êtes donc à la première lettre. La première lettre de l’alphabet est «a». En slavon, elle se prononce «az». Qu’est-ce qu’elle signifie? «Az» signifie «je», c’est-à-dire que vous devez maintenant commencer à vous examiner vous-même, votre propre «je». Regardez de plus près, et vous verrez en vous tous les défauts que vous n’y supposiez pas du tout. Vous verrez l’orgueil, la mère de tous les vices, et le découragement, et la paresse, et en regardant avec attention, vous verrez encore le jugement, et la colère, et l’avarice, et l’envie, et la malice. Vous direz: suis-je donc mauvais? Je ne le pensais pas! Mais la malice est là. Et là, voyez-vous, un géant se lève : la luxure… Tous les vices, toutes les passions sont en moi, mon Dieu, je suis un pécheur! Pas d’espoir de salut, je ne peux pas lutter, je n’en ai pas la force. Allons bon, vais-je me désespérer? Le Seigneur n’est pas venu pour appeler les justes, mais les pécheurs au repentir. Seigneur, «je» suis tellement faible, aide-moi!
Tout mon espoir repose sur Toi, Seigneur! Je vois maintenant que je ne puis rien faire par moi-même. Alors, reconnaissant votre indigence, ayant bien appris la première lettre de l’alphabet, vous appelez Dieu à l’aide, et vous passez à la deuxième lettre, «bouki» ; c’est un mot d’Ancien Slave qui signifie Dieu [N.d.T. : En russe : Bog]. Plus précisément, ce n’est pas «bouki», mais «bouk/ʲ/ ». Ainsi, ayant reconnu votre indigence, vous mettez tout votre espoir en Dieu, vous allez vivre selon la volonté de Dieu, selon Ses commandements. Vous tomberez, trébucherez, mais ce n’est rien, ne perdez pas votre espoir en Dieu. Vous tomberez, mais ne restez pas abattu à terre, il faut se relever au plus vite, et se remettre en chemin, toujours plus loin, toujours plus loin. Et ainsi vous vous ferez de plus en plus humble, voyant votre indigence. Voilà pour la deuxième lettre. Viennent ensuite les lettres v «vedi», g «glagol», d «dobro». Et ainsi, au fur et à mesure de vos réussites dans la vie de Dieu, vous vous approcherez de la troisième lettre «vedi», c’est-à-dire que vous commencerez progressivement à connaître la vérité [N.d.T. Connaître peut se dire en russe «vedat’»]. Vos pensées se clarifieront peu à peu, se purifieront. Et puis viennent «glagol», [N.d.T. En russe, «glagolat’» signifie parler.] et puis «dobro» [N.d.T.: En russe, bien.], c’est-à-dire que «la bouche parle de l’abondance du cœur» (Lc.6;45). Et voilà, vous constatez que tout ne se fait pas immédiatement, mais progressivement». (A suivre)
Traduit du russe
Source :
Saint Père Nikon, prie Dieu pour nous.