A ce jour, trois volumes des Paroles de Saint Païssios l’Athonite ont été traduits en français. Alors que les six volumes en grec ont été traduits en russe depuis des années. Le texte ci-dessous est la traduction d’un extrait du volume II L’Éveil Spirituel, dont la traduction russe a été publiée en 2001 aux Éditions Orthograph à Moscou. Le présent texte sera sans doute moins fidèle à la lettre de l’original grec que la traduction française officielle que nous attendons tous, mais malgré cela, les lecteurs francophones auront un avant-goût de ce que nous attendons tous et que la patience nous proposera dans plusieurs années peut-être, lors de la parution de ce volume en français. Il s’agit ici d’un extrait du chapitre 2 de la quatrième partie, pages 275 à 278 de l’édition russe.
– Geronda, certains mettent en doute toute la Providence Divine.
Mais comment est-il possible de prendre l’histoire du Christ pour une fable? Et bien sûr, tout ce qu’écrivirent au sujet du Christ les prophètes qui vécurent sept siècles avant Lui et parlèrent de Lui avec tant de détails, cela ne fait pas réfléchir tous ces gens? Dans l’Ancien Testament, on mentionne même avec exactitude la somme pour laquelle le Christ allait être trahi1 , et le fait que les Juifs ne placèrent pas cet argent dans le trésor du temple car il était le prix du sang, et qu’ils allaient s’en servir pour acheter une parcelle de terre pour y enterrer les étrangers2. Ce qu’ont prophétisé Zacharie et les autres prophètes s’est accompli jusque dans les détails. Tout est tellement clair! Les détails sont minutieux! Les Saintes Écritures indiquent même ce que l’on fit des vêtements du Christ3. Et tout cela fut dit de nombreuses années avant Sa Nativité. Mais comment alors, après tout cela puis-je admettre l’idée d’incroyance? Plus tard, nous voyons l’Apôtre Paul. C’était un persécuteur des chrétiens, et il se dirigeait vers Damas dans ce but. En chemin, le Seigneur lui apparut et lui dit : «Saul, Saul, pourquoi Me persécutes-tu?» «Qui es-Tu, Seigneur?», demanda Saul. «Je suis le Christ que tu persécutes», lui répondit le Seigneur. Ensuite, le Christ informa Ananias, qui baptisa le persécuteur. Que d’amertume l’Apôtre Paul dut-il avaler après cela, que d’exploits ascétiques dut-il accomplir, prêchant dans toutes les nations! Après vinrent les martyrs. Onze millions de martyrs! Eh bien, quelque chose n’aurait pas fonctionné pas dans la tête de chacun d’eux? Comment peut-on oublier tout cela? L’homme qui lit un tant soit peu l’Évangile peut-il ne pas croire? Peut-être que si les Évangiles contenaient plus encore de détails, cela aiderait beaucoup de gens à croire. Mais Dieu n’a expressément pas permis cela, pour que les gens soient passés au crible, pour qu’on sache clairement qui L’aimera, qui se sacrifiera pour Lui, sans attendre de miracle ni rien de la sorte. Je pense que quel que soient les blasphèmes qu’entend l’homme rempli de philotimo 4, ils ne le touchent pas, ils ne l’influencent pas.
Il faut croire en Dieu avec philotimo, et ne pas demander de miracle. Tu sais comme je suis troublé quand des adultes viennent me dire qu’ils voudraient voir un petit miracle qui leur permettrait de croire. S’ils étaient encore enfants, ils auraient une excuse liée à l’âge. Mais dire que «pour croire, il faudrait voir quelque chose», alors que soi-même, on ne fait rien pour le Christ, c’est si vil. Et même s’ils voyaient un miracle, cela leur serait-il utile? Ils diraient que c’est de la magie ou quelque chose du genre.
«Augmente notre foi»(Lc17;5)
– Geronda, comment se fait-il que certains saints, anciens et nouveaux, savaient quand allait arriver leur dernière heure ou quand un événement particulier allait se produire.
Ce qui les distinguait, c’est leur grand philotimo, leur grande simplicité, leur humilité et leur foi. Il ne mêlaient pas à leur vie la logique, qui déstabilise et ruine la foi. La foi, quelle grande chose! Vous avez vu que l’Apôtre Pierre, par sa foi, a marché sur l’eau, mais dès que la logique s’en mêla, il se mit à couler. Vous ai-je déjà parlé du Père Charalampos qui vivait encore il n’y a pas si longtemps au Monastère de Koutloumoussiou ? Il était tout simple, ardent au labeur, et c’était un moine de grande spiritualité. Quand il était vieux, une méchante grippe le cloua au lit. Le médecin ordonna aux moines du monastère de ne pas le quitter de l’œil parce qu’il ne lui restait plus guère de temps à vivre. Entendant cela, le Père Charalampos sous sa couverture intervint : «De quoi te mêles-tu? Moi, tant que Pâques n’est pas arrivée et que je n’ai pas dit «Christos Anesti!», je ne mourrai pas». Et effectivement, deux mois quasiment passèrent, et Pâques arriva. Il dit «Christos Anesti!», reçut les Saints Dons et s’endormit paisiblement dans l’éternité. Ce geronda tout simple, plein de philotimo était devenu un vrai enfant de Dieu, et avec Dieu, il désigna le jour de sa propre mort!
– Geronda, comment renforcer la foi?
La foi se renforce par la prière. L’homme qui n’a pas cultivé la foi en lui-même dès son enfance, mais qui est disposé à le faire, il peut la faire grandir par la prière en demandant au Christ d’augmenter sa foi. Nous devons demander au Christ d’augmenter notre foi et de la faire grandir. Que demandèrent les Apôtres au Christ? «Augmente notre foi». Si tu dis augmente, cela signifie que tu te confies à Dieu. Car si l’homme ne se confie pas à Dieu, qu’est-ce que Dieu pourrait augmenter en cet homme? Nous devons demander à Dieu d’augmenter notre foi non pour faire des miracles, mais pour L’aimer plus. Tout contribue à l’augmentation de la foi en Dieu, tant les fleurs que les sauterelles, les étoiles et la foudre. Nous voyons tout cela, mais nous n’en tirons aucun profit car nous acceptons les «télégrammes», les pensées que nous envoie l’ennemi. Par exemple, s’il n’y avait pas le sel, la mer pourrirait. Toutefois, si un homme dépourvu de foi analyse de l’eau de mer dans son laboratoire, il n’en tire aucun profit car il n’a pas purifié son propre cœur du sel. Si l’homme travaillait avec philotimo, avec de bonnes pensées il verrait même ce qui lui semble absurde d’un œil différent, à l’aide de l’éclairage de Dieu. Et il rendrait gloire à Dieu.
Traduit du russe
Source : Преподобный Паисий Святогорец «Слова. Том II. Духовное пробуждение». Издательство:Орфограф, Москва. Pp. 275-278.
- Zacharie 11,1-13.
- Jérémie 18,2;32,9.
- Psaumes 22,19
- Dans un texte publié le 19 avril 2010 sur le site <em>Un Orthodoxe Ordinaire</em>, on trouve le commentaire suivant au sujet du terme <em>philotimo</em>. Dans une note extraite du livre St Arsène de Cappadoce par le Père Païssios traduit et édité par le monastère St Jean le Théologien Souroti de Thessalonique (où repose Père Païssios) on peut lire cette définition plus spécifiquement chrétienne orthodoxe : φιλότιμο = noblesse d’âme, bonté, reconnaissance, amour purifié exempt de tout retour sur soi, de celui qui ne regarde jamais son propre intérêt mais ne cherche qu’à être agréable à Dieu, le Père Païssios considérait cette vertu comme le fondement du progrès dans la vie spirituelle.