Texte de l’Archimandrite Raphaël Kareline, défenseur ardent de la Tradition de l’Église. Il a consacré une grande partie de sa vie longue de 90 ans ainsi que la majeure part de sa production littéraire foisonnante à la défense des dogmes et à la façon de les mettre en œuvre dans la vie de l’Église et du chrétien. Le texte ci-dessous a été publié le 27 janvier 2011 sur le site Pravoslavie.ru, où il était repris du site de l’auteur. Le 14/23 janvier, l’Église célèbre la mémoire de Saint Nina de Géorgie, Égale-aux-Apôtres. Quelques éléments de biographie de l’Archimandrite Raphaël sont accessibles ici.
L’événement le plus significatif de l’histoire de la Géorgie fut la conversion du pays au Christianisme suite à la prédication de Sainte Nina, l’ Égale-aux-Apôtres. La lumière de l’Évangile, apportée en Géorgie par la vierge Nina, et telle un luminaire tiré du feu de l’église à Jérusalem, prit corps dans de merveilleuses œuvres littéraires chrétiennes, dans les arts pratiqués dans les églises, dans de grandioses basiliques pareilles à des statues sculptées dans de gigantesques blocs de granit, et dans les églises, fleurs de pierre qui ornent tous le pays, jardin de la Très Sainte Mère de Dieu, dans les chapelles qui couronnent les sommets montagneux, si bien que rocs et falaises semblent être leurs marches-pieds. Cette lumière rayonne des icônes anciennes et des fresques d’une profondeur spirituelle extraordinaire. Cette lumière brille dans les chants sacrés. Ceux-ci ont illuminé les pages des vies des saints et des chroniques de la Géorgie, mais surtout, la lumière apportée par Sainte Nina a changé et transfiguré l’âme du peuple.
Le christianisme a fait de l’homme une créature nouvelle. Il lui a donné la dignité de l’image et de la ressemblance de Dieu, il a ouvert des trésors spirituels éternels. Le christianisme a tourné la pensée et le cœur de l’homme vers l’éternité. Il lui a donné la possibilité, dans une expérience mystique, de vivre une nouvelle naissance et la résurrection de l’âme. Le christianisme a ouvert à l’homme la vraie liberté de l’amour, au lieu de la liberté païenne des passions et de l’arbitraire. La théologie chrétienne répondit aux questions séculaires soulevées mais non résolues par la philosophie. La doctrine de l’Évangile a montré que chaque personne, unique et non-duplicable, est une valeur suprême. Le christianisme devint une impulsion puissante pour repenser et développer les relations entre les hommes et entre les peuples, fondées sur le respect de l’homme en tant qu’image de Dieu et manifestation de l’éternité sur terre. La lumière apportée par Sainte Nina a illuminé le parcours historique de la Géorgie pendant de nombreux siècles. Le baptême de la Géorgie marqua le début d’une nouvelle ère dans la vie spirituelle du peuple.
La première prédication évangélique résonna en Géorgie de la bouche des Apôtres eux-mêmes. Elle était comme les premiers rayons de la lueur du matin, qui éclairent les sommets des montagnes, comme pour les arracher à la captivité de la nuit et des ténèbres. La glace et la neige séculaires brillent d’un éclat éblouissant, mais le brouillard tourbillonne encore dans les gorges comme la fumée noire d’un feu de camp. Le monde est plongé dans le sommeil et la nuit d’avant l’aube. Les sommets éclairés par la lumière, ce furent les premières communautés chrétiennes fondées par les apôtres. Mais le peuple resta captif du paganisme.
Les Apôtres André le-Premier-Appelé, Simon le Cananéen et Matthieu semèrent les graines de la doctrine de l’Évangile dans le pays de Géorgie, mais trois siècles s’écoulèrent avant que cette terre ne soit couverte de fleurs divines et merveilleuses. Comme le cours de l’Aragvi change de direction, du Sud vers l’Ouest, à la limite de Mtskheta, le baptême de la Géorgie dans l’Aragvi détourna tout le cours de son histoire de l’Iran vers Byzance.
Le IVe siècle fut le moment de la conversion au christianisme des pays du Caucase; les frères de Géorgie, d’Arménie et d’Aghbanie, et cette maison chrétienne devint une forteresse imprenable pour ses ennemis.
Sainte Nina était selon l’antique tradition la cousine de Saint Georges le-Victorieux. On observe beaucoup de points communs dans les représentations du preux frappant le dragon et de la jeune vierge, levant dans sa main, la Croix, soleil spirituel de la Géorgie.
La Géorgie est un apanage de la Très Sainte Mère de Dieu. La Toute Sainte Vierge choisi une vierge, sainte Nina, encore quasi une enfant, pour devenir l’Apôtre de l’Ibérie. Et elle combattit et vainquit le paganisme par la croix, telle une épée, et illumina le pays de la lumière de l’Évangile. Elle captiva le cœur des gens avec le feu de l’amour que le Christ apporta du ciel sur terre. Elle tourna le peuple vers le Christ non pas par l’art de la parole, mais par le pouvoir de la grâce. Le choix de Nina fut scellé par son don des miracles et des guérisons. Mais la conversion du pays par la jeune fille fut le plus grand miracle. L’existence de la lumière est impossible à prouver, il faut la voir. Sainte Nina elle-même était un luminaire éclatant, et les gens qui communiquaient avec elle ressentaient cette lumière dans leur âme; ils voyaient la beauté éternelle de l’Évangile. Ils percevaient la prédication de Nina comme une nouvelle vie qui leur était inconnue.
Sainte Nina vécut dès son enfance dans une église de Jérusalem avec son oncle le Patriarche Juvénal. Cette église était située sur le flanc du Mont Sion, où le Saint-Esprit descendit sur les apôtres (l’église de la Résurrection du Christ Sauveur n’avait pas encore été construite). Sainte Nina grandit à l’ombre de l’église, comme la Très Sainte Mère de Dieu demeura pendant dix ans dans le temple de l’Ancien Testament , accomplissant le vœu de ses parents. La Toute Sainte Vierge Marie avait accès au Saint des Saints. La vierge Nina pria à l’endroit où le Saint-Esprit descendit sous la forme d’une flamme, et fonda l’Église du Nouveau Testament dans la chambre haute de Sion.
Jérusalem est un livre de pierre qui raconte le Christ. Là, l’air retient le souffle de Sa bouche et la terre les traces de Ses pieds. C’est comme si le temps s’était arrêté et il semble que Christ soit là, comme pendant Sa vie terrestre.
Sainte Nina vécut dans cette église, comme une moniale recluse. L’église est lumière spirituelle concentrée. En dehors de l’église, cette lumière devient diffuse et faible. Dans le silence de l’église, elle entendit les voix des anges, dans des visions, elle parla avec le Christ Sauveur, comme Paul avec Jésus face à face dans le désert d’Arabie. La Très Sainte Mère de Dieu lui apparut, comme aux apôtres après Sa Dormition. De ses yeux spirituels, elle vit le début et la fin du monde. La prière la transforma. La jeune vierge semblait être l’incarnation de l’esprit des anciennes prophéties, ou un ange qui avait pris une forme humaine. (A suivre)
Traduit du russe