L’original russe du texte ci-dessous a été publié sur la page du réseau VK de l’Archimandrite Raphaël Kareline sous le titre Подвижник горы Кармил (Le héros de l’ascèse du Mont Carmel). Ce texte fut publié à l’occasion de l’anniversaire de la natalice du Père Archimandrite Lazare (Abachidzé) de bienheureuse mémoire (23.07.1959–17.08.2018), grand héros de l’ascèse et défenseur ardent de la Tradition de l’Église en Géorgie, dont il a déjà été question ici. L’Archimandrite Raphaël et l’Archimandrite Lazare eurent l’occasion de se rencontrer à maintes reprises.
Deux jours avant la fête de la Transfiguration, l’Archimandrite Lazare Abachidzé, éminent héros de l’ascèse et flambeau de la prière de Jésus, a atteint le terme du chemin de sa vie terrestre. Un ascète sur terre de moins et une étoile de plus dans le ciel spirituel de l’Église, qui nous éclairera depuis sa place dans l’éternité. La vie terrestre de l’Archimandrite Lazare fut un témoignage et une confession de l’Orthodoxie, qu’il prêcha avant tout par son exploit spirituel personnel. Le plus efficace et le meilleur type de prédication de l’Orthodoxie est l’acquisition de la grâce, cette lumière invisible qui agit directement sur les âmes des gens, cette force invisible qui rend la foi évidente et captive l’homme par la beauté de la lumière intérieure.Ceux qui rencontrèrent le Père Lazare remarquaient qu’en sa présence ils connaissaient un certain calme et une paix d’âme particulière, incomparables à toutes les expériences du monde. Dans ces moments-là, ils semblaient respirer l’air de l’éternité. De telles rencontres restent à jamais dans la mémoire de l’homme, bien qu’il faille parfois beaucoup de temps pour réaliser leur profondeur et leur grandeur.
Le Père Lazare avait choisi le chemin de la solitude et du silence, le chemin de l’hesychia, lorsque l’âme de l’homme s’unit à Dieu. L’hésychaste est celui qui mène sa vie conformément aux conseils des anciens héros de l’ascèse, marchant sur un chemin spirituel, qui à notre époque a été envahi par l’herbe de l’oubli. L’hésychaste devient le messager de la vérité de la vie pour laquelle l’homme a été créé, joie éternelle, ressemblance à Dieu, et l’état que l’Église appelle la déification. L’hésychaste révèle aux gens que le plus grand bonheur est d’unir son cœur à Dieu. Maintenant, beaucoup de gens réfléchissent et discutent de ce qu’il faut faire pour que le christianisme devienne proche et compréhensible pour les contemporains, comment leur expliquer la doctrine de l’Église, afin qu’ils l’acceptent comme philosophie suprême. Cependant, en cette matière, il n’y a qu’un seul chemin ici: acquérir la grâce et alors la grâce elle-même révélera à l’homme ce qui est supérieur aux mots et aux expériences de l’âme; alors la parole elle-même acquerra de la force et à travers elle se révélera le sens mystérieux de ce que Dieu est avec nous. Pour parler de lumière, il faut être soi-même éclairé par cette lumière. La signification du héros de l’ascèse et de son podvig se révèle particulièrement après sa mort.
L’Archimandrite Lazare fut un apologiste de l’Orthodoxie. Il rédigea plusieurs œuvres qui exposent la malignité du libéralisme, qui, comme la moisissure, pénètre dans l’âme des hommes et femmes contemporains, y compris une partie des chrétiens. Pour lui, l’Orthodoxie était immuable et toute réforme, tout modernisme, était une dégradation et une perversion du christianisme. En même temps, il se dressa contre le fanatisme aveugle qui engendre oppositions et schismes.
Ses livres «Des maux secrets de l’âme» et «Le Sacrement de la confession» sont des guides de la vie intérieure de l’homme, et on peut dire que «Le martyre de l’amour» est son journal spirituel. Quel que soit le sujet qu’il abordait, le Père Lazare écrivait dans une langue claire et accessible non seulement aux théologiens érudits, mais aussi à ceux qui viennent de commencer la vie en l’Église. Après sa mort, certaines de ses écrits demeurent encore à l’état de manuscrits. Espérons qu’ils soient publiés et viennent compléter ses œuvres apologétiques.
La publication de l’album des icônes, peintes par le Père Lazare fut un événement important dans la vie de l’Église moderne. L’Archimandrite Lazare était un iconographe remarquable, l’un des meilleurs de notre temps. Ses icônes reflètent la lumière spirituelle d’hesychia et de la prière, qu’il avait conquises au cours de sa vie érémitique. Les icônes du Père Lazare sont empreintes d’ une profonde pénétration. Elles se distinguent par leur beauté spirituelle et par une sorte d’aristocratie et d’élégance particulières. L’icône est l’image visuelle d’un saint transformé par la lumière divine, qui regarde depuis l’éternité et appelle l’homme à la communion de prière avec lui. Il semble que chaque icône de l’Archimandrite Lazare soit un poème écrit non pas avec des mots, mais avec des couleurs, et que le pinceau qui a écrit cette icône est tenu par deux mains: celle du Père de Lazare et celle de celui qui est représenté sur l’icône. La combinaison des couleurs et des tons est harmonieuse, et on peut dire de ces icônes qu’elles sont musicales; elles sont lumière transformée en couleurs.
Le Père Lazare termina sa vie terrestre dans une maladie douloureuse, dernière épreuve du feu que le Seigneur envoie pour brûler dans l’âme de l’homme les dernières racines de ses passions et traces de ses péchés. Il était alors mûr pour la vie éternelle, et nous croyons que le Seigneur l’a pris à Lui. Mais il demeure avec nous dans ses livres, ses icônes et dans sa tombe dans la skite qu’il construisit de ses propres mains. Mémoire éternelle!
Traduit du russe
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