Article publié sur le site Optina-pustin.ru le 15 janvier 2013, et initialement rédigé par Anton Jogolev, journaliste éditeur du magazine et du site internet Blagovest Samara, en 2000, moins d’un an après la mort (le 14 janvier 2000) de la Bienheureuse Folle-en-Christ et Moniale du Grand Schème Maria Ivanovna Matoukassova, l’une des grandes staritsy de la Russie contemporaine.
Les dernières années de la vie de la Bienheureuse Moniale du Grand Schème Maria furent été liées au Désert d’Optino. Si, son podvig initial de folle-en-Christ s’accomplit au vu et au su de tous, lorsqu’elle reçut le grand schème, en janvier 1998, c’est une service différent qu’elle rendit, celui d’intercéder par la prière pour le monde entier et, selon les paroles du velitchanié des saints moines, devenir «guide des moines et interlocutrice des anges». Cette période de sa vie est racontée par le Hiérodiacre Alexandre (Matioukhine), membre de la communauté monastique du Désert de l’Entrée au Temple d’Optino, écrivain spirituel, auteur d’un livre sur un ascète contemporain, le Starets Nikolas de Diveevo.

Estimez-vous que Maria Ivanovna a été acceptée au Désert d’Optino comme une femme de Dieu?
Matouchka Maria elle-même a répondu à cette question, avant de mourir, en quittant notre monastère… Les uns l’acceptèrent, les autres pas … Il y eut des admirateurs sincères de la Staritsa, et il y en eut beaucoup. Mais apparemment, ses prédictions et ses conseils ne recevaient pas d’acceptation unanime, ils étaient écoutés, mais pas mis en œuvre.
Mais quelle qu’ait été l’attitude de certains envers Matouchka, nous étions nombreux à éprouver le sentiment que toute la situation dans le monastère était dirigée par la Moniale du grand schème Maria. Elle restait calmement assise sur sa chaise, apparemment n’intervenait dans rien, se «faisait toute petite», de toutes les manières possibles, et pourtant toute la situation était entre ses mains. Le microclimat du monastère s’améliora notablement avec l’arrivée de la Staritsa chez nous.

En quoi consistait le service de la Moniale du grand schème Maria dans votre monastère?

Matouchka Maria, Matouchka Eugénie et le Hiérodiacre Alexandre

Le Starets Nectaire disait: «cherchez le sens profond de toutes choses». Matouchka Maria vint une première fois à Optino pour la fête de la Nativité de la Très Sainte Mère de Dieu. La Très Sainte Mère de Dieu nous l’a amenée. Cela a été dit à plusieurs reprises par Matouchka Maria elle-même: elle était une novice de la Très Sainte Mère de Dieu. Et à propos du Désert d’Optino, la Staritsa a dit: «Ici, il y a beaucoup, beaucoup de blé (de grâce), mais combien de trous…». Alors elle vint à nous, boucher ces trous… «Je sème petite graine après petite graine. Et puis le blé grandira et tout sera coupé avec une faucille…», disait-elle. Son ministère dans le monastère était de maintien de la paix. Cela m’a été dit par mon confesseur, le célèbre Starets Archimandrite Kirill (Pavlov). Avant que nous ayons emmené la Staritsa Maria auprès de lui, le Starets Kirill et moi avions eu une conversation. Il m’avait interrogé au sujet de Matouchka et, après l’avoir rencontrée, il dit: «Matouchka est venue à vous en tant que pacificatrice».
La Staritsa Maria est venue au monastère pour nous rappeler la pauvreté évangélique. A l’époque, au monastère, nous étions fortement concentrés sur sa reconstruction, sur la consolidation matérielle du monastère. Et elle essaya de diriger nos cœurs et nos yeux vers la construction intérieure, la construction du temple de l’âme. Quand les moines venaient à elle, elle disait souvent «Et vous lisez le livre? Lisez le livre…» La Staritsa voulait dire: est-ce que vous honorez l’Évangile? Et si vous l’honorez, vous devez vivre dans l’Évangile… Elle nous donnait l’Évangile et nous demandait de lire plusieurs chapitres à haute voix. Saint Nifont de Chypre a écrit «Toute la méchanceté dans le monde provient de l’ignorance des écritures». Et la Staritsa Maria nous l’a rappelé.
Avant l’arrivée de Matouchka Maria à Optino, une autre staritsa, la Moniale du grand schème Sepfora, menait son podvig non loin du monastère, dans le village de Klykovo. Son ministère était-il également lié au monastère?
Lorsque mourut la Moniale du grand schème Sepfora, Matouchka Maria a dit: «la vieille Femme est allée au ciel et a emporté tout le blé». Cela signifiait qu’il n’y avait plus personne nourrir spirituellement le monastère. La Moniale du grand schème Sepfora, comme Maria Ivanovna, fit tout son possible pour que les frères du monastère tournent leur regard vers l’œuvre intérieure, et pas seulement sur la construction extérieure.
On connaît la prophétie de la Staritsa Sepfora selon laquelle après elle, viendrait au Désert d’Optino, une autre Staritsa, plus grande qu’elle…
À la veille de la fin du sixième mois suivant la mort de la Moniale du grand schème Sepfora, le nouveau cellérier du monastère refusa de donner les aliments nécessaire pour l’organisation de la commémoration de la Staritsa. Mère Panteleimona s’est alors adressée à Maria Ivanovna, lui demandant de prier pour qu’une commémoration, même modeste, juste de la gelée et de la kacha puisse être payée par les donations de ceux qui vénéraient la Staritsa. La Staritsa Maria répondit mystérieusement : «Il y aura une bonne commémoration, une belle commémoration…». Et la nuit venue, arriva une servante de Dieu qui vénérait beaucoup la Staritsa Sepfora. Elle amena beaucoup de victuailles. Quand nous sommes arrivés à Klykovo, nous nous sommes assis à la table commémorative, et nous avons été émerveillés par l’abondance des plats. Même le monastère n’aurait pu organiser une veillée de commémoration aussi riche. Escalopes de dos d’esturgeon, et du dos d’esturgeon dans la soupe… Une bonne et belle commémoration, en effet…
Vous souvenez-vous de l’une ou l’autre prophétie importante de la Moniale du grand schème Maria?
La Staritsa jouissait sans aucun doute du don de prophétie. Mais elle ne répondait jamais directement aux questions. Elle le faisait en paraboles, au moyen d’allégories… Devant moi, le Starets Archimandrite Kirill lui a demandé: «Qu’est-ce qui nous attend?» . Elle répondit en parabole: «De l’eau, du sable, de l’argile… Les briques sont sculptées, la brique à la brique est ajustée, le poêle russe est chaud-chaud… Il y a beaucoup de pains, de petits pains…». Que voulait dire la Staritsa? Peut-être des persécutions, des emprisonnements… Dieu sait. Je lui dis (j’étais alors cellérier du monastère): «Mère, peut-être devrions-nous nous faire une provision de conserves?» «Faites une provision de prière!» répondit la Staritsa.
Avez-vous ressenti personnellement la puissance de la prière de la Staritsa?

La Bienheureuse Maria

Lorsque mes lourds problèmes commencèrent, Matouchka m’aida beaucoup. C’était très dur, et nulle part je ne trouvais de paix… J’allai voir Matouchka. Quand j’arrivai, elle dormait (mais en même temps, elle priait). L’une des habitantes de Samara qui demeurait à l’époque avec Matouchka m’apporta des pommes de terre que celle-ci n’avait pas mangées. Et elle me dit un peu confuse : «Matouchka a dit qu’un homme allait arriver maintenant, il aurait besoin d’un «docteur», et il fallait lui donner à manger.» J’ai mangé des pommes de terre et… trouvai la paix. C’était comme si j’avais pris un puissant sédatif. C’est ainsi que Matouchka m’aida à résister à une attaque de l’ennemi. Puis je suis venu une autre fois chez elle, les larmes aux yeux. En priant, elle faisait défiler les nœuds de son tchotki. Elle était allongée sur le lit de telle sorte que sa tête pendait au-delà du bord. Elle était tendue et toute tremblante. Elle se leva et dit: «Voilà, c’est tout!..». Puis elle ajouta doucement, au sujet de mon état : «Sortir ainsi de soi-même!». À partir de ce moment, la tentation diminua et s’estompa complètement le jour de la mort de Matouchka. Et il me semblait même qu’elle continuait à vivre, pour me sortir finalement du pétrin, me tirer des griffes de l’ennemi…
Traduit du russe
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