Andreï Viaziguine est l'auteur du livre «Manifeste du Nationalisme constructif» (Манифест созидательного национализма), dont est extraite et traduite des pages 165 et 166, la première partie du texte ci-dessous. Viaziguine naquit en 1867, il fut historien, enseignant à l'Université de Kharkov. Il fut arrêté, emprisonné, bestialement torturé et assassiné par les bolcheviques en 1919. Il semble que la cause de leurs agissements fut la conviction de Viaziguine que le peuple russe devait vivre selon ses propres coutumes, traditions et idéaux, personne n'étant habilité à imposer aux Russes un mode de vie étranger. Son ouvrage a été publié en 2008, à Moscou, aux éditions de l'Institut de la Civilisation Russe.
Ce premier extrait est complété par un second, tiré de la page 287 du livre de l'historien Pëtr Multatuli ««L'Empereur Nicolas II, l'Homme et le Monarque» («Император Николай II. Человек и монарх», Éditions Veche, Moscou, 2016) dans lequel l'auteur rapporte les propos du publiciste et philosophe D.A. Khomiakov au sujet du Manifeste Impérial du 26 février 19031. Dans la première partie de la traduction, les passages entre guillemets et en italiques reprennent le texte du Saint Tsar Nicolas II dans son Manifeste Impérial précité, dans la seconde partie de l'article, ils reprennent les propos de D.A. Khomiakov.
La décennie qui vient de s’écouler, sous le règne couronné de succès du Souverain Empereur Nicolas II, clarifie à suffisance les idées maîtresses qu’il posa en tant que fondement de son service impérial à la Russie et exposa dans une série de ‘Manifestes Impériaux’.Parmi ces adresses du Tsar à l’ensemble de ses fidèles sujets, la première place est incontestablement occupée par le Manifeste du 26 février 1903, auquel la société accorde pour l’instant une attention intense. L’Empereur de toutes les Russies y souligne que c’est «par la volonté de la Divine Providence [qu’il est ] monté sur le Trône Ancestral et [a pris] le saint engagement devant la Face du Très Haut, et devant sa propre conscience, de veiller religieusement sur l’institution séculaire du Pouvoir propre à la Russie et de consacrer sa vie au service de la Patrie bien-aimée».
Tout le monde sait que le premier des fondements séculaires de la vie historique de notre Patrie est l’Orthodoxie: elle introduisit nos ancêtres dans la culture mondiale, elle nous offrit les rudiments de l’enseignement et de la citoyenneté, elle implanta et soutint l’ordre dans l’État, elle nous libéra des troubles et des bouleversements religieux qui furent le lot des peuples de l’Occident, car la Sainte Écriture, source vivante de la vérité universelle, fut mise à la disposition de tout le peuple russe dès qu’il se convertit au Christianisme. Ces idéaux éternels furent proposés aux Russes à travers les commandements de l’Évangile, c’est dans l’aspiration inflexible à l’accomplissement de ceux-ci que réside le sens du Pouvoir propre à la Russie.
C’est ainsi que l’Empereur Nicolas II offre l’exemple de l’Église et de ce qu’elle prescrit: il observe pieusement et scrupuleusement tous les rites de l’Église, et accorde un soin attentif et diligent à l’intégration des commandements chrétiens dans les cœurs des nombreux millions de ses sujets. Et il porte une attention immuable à ce que la jeunesse soit éduquée dans un esprit religieux et moral, comme en témoigne, entre autres, l’aide qu’il apporte aux écoles paroissiales. Il souhaite que les générations montantes s’approprient consciemment les vérités chrétiennes; c’est pourquoi dans les classes terminales des écoles moyennes on a introduit un cours permettant aux apprenants de se familiariser avec les conclusions des sciences théologiques.
Selon notre Souverain, la vie sociale elle-même doit être étroitement liée à la paroisse, qui jadis constitua le noyau de notre structure sociale: «Le Manifeste du 26 février assigne la tâche de mise en ordre de la vie locale à un rapprochement entre la gestion publique et l’activité des administrateurs paroissiaux des églises orthodoxes. L’amélioration de la situation matérielle du clergé orthodoxe rural est indispensable à l’intensification d’ un engagement fructueux des serviteurs du culte dans la vie spirituelle et sociale de leurs ouailles».
Notre Patrie comptant des millions de sujets hétérodoxes ou pratiquants d’autres cultes; à tous il est permis de «jouir de la liberté d’exercer leur foi et leurs offices conformément aux rites qui y sont liés, mais à l’Église Orthodoxe sont pieusement attribuées primauté et prédominance».
Dans ses «Notes à propos de l’allocation en partage (A l’occasion du Manifeste Impérial du 26 février 1903)», le penseur orthodoxe D.A. Khomiakov estime que Nicolas II a, à cette occasion, restauré «l’ordre naturel» perdu à l’époque de Pierre Ier. L’auteur affirme que le système russe antique basé sur l’unité de l’Autocratie et du peuple fut brisé sous Pierre Ier, et remplacé par «le principe de l’arbitraire personnel absolu». Ceci détermina un mouvement arrachant et éloignant pouvoir et intelligentsia du simple peuple. Selon Khomiakov, «la signification énorme du Manifeste du 26 février» réside précisément en ce qu’il rendait au pays «les idéaux immémoriaux de la société et de l’État russe», et l’orientation vers le peuple, «que l’autorité et la société pouvaient seulement représenter».
Traduit du russe.
- Il s'agit du Manifeste Impérial du 26 février 1903, «Portant prescriptions destinées au perfectionnement de l'ordre public». Le Souverain y appela «à une unité étroite tous les fidèles fils de la Patrie, afin d'améliorer l'ordre public par l'établissement d'une robuste organisation de la vie locale».