Agionoros.ru a mis en ligne une série de textes concernant des ascètes contemporains. Plusieurs de ces textes concernent Geronda Seraphim (Dimopoulos), dont une biographie fut publiée en 2011 : «Père Seraphim Dimopoulos (1937-2008). Un ascète dans le monde contemporain» («Πατήρ Σεραφείμ Δημόπουλος (1937-2008) Ένας ασκητής στον συγχρονό κόσμο». Les textes publiés par Agionoros.ru ne sont pas extraits de ce livre, mais ont plutôt pour objet d’apporter un éclairage complémentaire.

Éléments de biographie.
Père Seraphim Dimopoulos naquit en 1937, en la ville d’Héraklion, sur l’île de Crète. Lors de son baptême, on le nomma Christos. Il fut le deuxième enfant de la famille nombreuse de ses parents Constantin et Irène ; ils eurent sept fils. La famille Dimopoulos était originaire d’Asie Mineure. Le saint Métropolite Chrysostome de Smyrne, mort en martyr, livré le 10 septembre 1922 par le Pacha Nourredine à la vindicte de la foule hystérique, était membre de la famille Dimopoulos. Les enfants de Constantin et Irène reçurent une éducation orthodoxe. Dès son plus jeune âge, Christos manifesta un amour particulier pour l’Église et la vie ascétique. Très tôt, il demanda à ses parents de lui octroyer une chambre qui lui serait propre. La mère accepta de le séparer de ses frères, mais résolut de dormir dans la même chambre que lui jusqu’à ce qu’il ait grandi. C’est alors que la Panagia apparut en songe à Irène et lui dit : «Ne l’empêche pas de mener la lutte ascétique». Le garçon fut dès lors autorisé à dormir seul dans sa chambre, recevant ainsi la possibilité de prier pendant la nuit.

Geronda Philotheos

Il étudiait avec assiduité et observait la prudence, fuyant toutes les occasions de pécher. Jamais il ne manqua l’école du dimanche, et il fréquentait tous les offices liturgiques. Adolescent, il approfondit ses connaissances en matière de théologie orthodoxe, se préparant en toute conscience à la prêtrise. Pendant ses années d’étude, il visitait les monastères avec régularité, et tout particulièrement, deux monastères renommés pour leur spiritualité, celui de Saint Seraphim de Domvou [Au pied du Mont Hélicon, en Béotie N.d.T.], et celui de Longovarda, sur l’île de Paros, dont l’higoumène était Geronda Philotheos (Zervakos) de bienheureuse mémoire.

Lien spirituel avec l’Athos et Saint Païssios l’Athonite
Après avoir terminé ses études à la Faculté de Théologie, Christos effectua son service militaire. Ayant rempli son devoir envers la patrie, il vécut quelques temps au ‘Vieux Russikon’ sur la Sainte Montagne, sous la direction du Starets Georgii, d’origine serbe. C’est auprès de celui-ci que le futur Geronda Seraphim acquit la prière noétique incessante. Il ne plus pas à Dieu de permettre au Père Seraphim de demeurer en permanence sur l’Athos, mais c’est toujours avec chaleur et recueillement qu’il se remémora «le Jardin de la Mère de Dieu». «Tout ce dont nous nous occupons ici dans le monde, la prédication, les œuvres de bienfaisance… c’est pour les jeunots (de la vie spirituelle). La Sainte Montagne, voilà l’université spirituelle. Là, non seulement les moines font la guerre à leurs passions, mais ils extirpent jusqu’aux racines de celles-ci. Le moine doit rester dans sa cellule. Si sans cesse il va de par le monde, il ne connaîtra guère de succès en sa vie spirituelle». Un jour, on apporta à Geronda Seraphim un livre à propos de la Sainte Montagne. Il le prit en mains avec respect, commença à le feuilleter et vénéra chacune des photos montrant un geronda athonite, après quoi il le remit pieusement à son propriétaire. Une autre fois, on demanda à Geronda Seraphim s’il connaissait Geronda Païssios l’Athonite.
– Oui, nous nous sommes rencontrés maintes fois, lui et moi. Son regard était pénétrant. Il lisait en son interlocuteur comme s’il s’était agit d’un livre ouvert. Quand des gens affligés d’une grave maladie venaient me voir (surtout dans les cas de cancer), j’écrivais à leur sujet à Geronda Païssios et lui demandais ses prières. Pas un seul ne mourut, tous guérirent.
– Mais Geronda, pourquoi le Seigneur a-t-Il donné une telle Grâce à Geronda Païssios?
– Sais-tu comment priait Geronda Païssios? Par comparaison à lui, nous ne faisons rien. Mais à l’aide de la prière, tout est possible.
– Et comment se fait-il que les gens qui commencent à lire les livres de Geronda Païssios ne peuvent s’en détacher, alors qu’ils délaissent d’autres livres dans la plus grande indifférence?
– Geronda Païssios jouissait d’une immense Grâce. Elle imprègne les pages de ses écrits. Les lecteurs le sentent et en retirent une immense consolation. La Grâce qui l’habitait était si grande que même les livres écrits à son propos par d’autres auteurs attirent les lecteurs à la manière d’aimants. Mais je suis profondément convaincu de ce que nous ne connaissons rien de Geronda Païssios. Notre connaissance de ce héros de l’ascèse est extrêmement réduite. Il traversa des circonstances absolument extraordinaires, mais à cause de sa profonde humilité, il n’en dit jamais un mot à personne. Il est vrai que les mots sont impuissants à décrire ce genre de choses».
Saint Païssios l’Athonite aimait beaucoup Geronda Seraphim et le tenait en grande estime. A un groupe de jeunes, venu de la ville de Larissa, Saint Païssios dit : «Pourquoi donc venez-vous près de moi alors qu’un saint homme vit à côté de vous, Geronda Seraphim?». Ayant pris le Saint au mot, un des jeunes revint quelque temps plus tard auprès de Saint Païssios et lui dit qu’aucune paroisse de Larissa n’était desservie par un prêtre nommé Seraphim. Il ne savait pas que Geronda Seraphim n’avait de paroisse propre ; il était à cette époque le prédicateur attitré de la métropole de Larissa et célébrait dans les villages les plus éloignés de celle-ci. Saint Païssios lui dit : «Pourtant c’est bien là que se trouve Geronda Seraphim. Mais il se cache, comme le lièvre se cache dans les buissons. Cherchez un peu, vous finirez par le trouver». Konstantinos Athanasopoulos, théologien renommé et Directeur de l’Académie de Larissa, était un hôte régulier de Saint Païssios. A chaque visite, le saint prenait inévitablement des nouvelles de Geronda Seraphim et demandait de lui transmettre ses salutations. Un jour, on raconta à Geronda Seraphim qu’un moine de la Sainte Montagne avait exprimé des propos peu élogieux à l’égard de Saint Païssios, mettant sa sainteté en doute. Geronda Seraphim se fâcha et dit avec une spontanéité et une conviction toutes enfantines : «Geronda Païssios, c’est un saint. Quoi qu’on dise de lui». Il éprouvait une telle dévotion envers Saint Païssios qu’il avait placé la photographie de celui-ci au-dessus de son lit, à côté des icônes du Sauveur et de la Toute Sainte Mère de Dieu.

Son ascèse
Geronda Seraphim avait acquis une petite parcelle à proximité de la ville de Larissa, dans le voisinage de la prison, et il y construisit la kaliva de son ermitage. Geronda choisit intentionnellement cet endroit au milieu de terres incultes ; son refuge était en effet au centre d’un «triangle de douleur» : d’un côté, la prison, d’un autre l’hôpital et du troisième, le cimetière. Sa kaliva n’était pas pourvue d’une arrivée d’eau ; il fallait aller en chercher loin. Pour se chauffer, il utilisait un poêle, mais il ne l’allumait que rarement. Les visiteurs qui venaient en hiver tremblaient de froid, mais lui semblait réellement ne pas remarquer le froid. Souvent en hiver, en dépit de la froidure, porte et fenêtres étaient grandes ouvertes. De l’extérieur, la kaliva de Geronda Seraphim paraissait abandonnée ; les herbes folles avaient envahi la cour où s’ébattaient souris et rats.
Un ami menuisier vint un jour réparer une porte à l’étage, et il constata à cette occasion que Geronda n’avait pas de lit. Le Père Seraphim dormait sur le sol en béton. Une vieille couverture servait de lit, un vieux manteau, de couverture, et une veste roulée, d’oreiller. En bas, Geronda se faisait bouillir un poivron sur un petit réchaud dans une boîte de conserve ; c’était sa seule nourriture, ce jour-là. Geronda Seraphim avait perdu ses dents et il avait des difficultés pour mâcher la nourriture. D’habitude, il mangeait un peu de pain avec du tahin, buvant café ou thé. Il recommandait à ses enfants spirituels de manger du tahin. Son menu était complété par un peu de pâtes, des légumes et des fruits. Il avait l’habitude de manger les aliments sans les cuire ; il ne le faisait que rarement, non pas pour leur conférer plus de goût, mais pour qu’ils s’attendrissent. Quand on lui apportait de la nourriture plus élaborée, Geronda la donnait, subrepticement, aux chiens. Même les bons fruits mûrs qu’on lui apportait, il s’efforçait de ne pas les manger ; «Il ne faut rien m’apporter, je prépare ma nourriture moi-même», disait-il à ses visiteurs. Souvent, il ne mangeait rien pendant plusieurs jours. Un jour, quelqu’un lui apporta une prosphore qu’il accepta en disant : «Gloire à Dieu ! Je n’ai rien pu manger depuis plusieurs jour!» Jamais il ne buvait de vin. Il n’enfreignit même pas cette habitude lorsque l’Archevêque Anastasios d’Albanie lui envoya deux bouteilles d’un vin exceptionnel. De l’eau elle-même, Geronda n’en buvait qu’avec modération. (A suivre)
Traduit du russe

Source.