Le texte ci-dessous, de Youliana Biezouglova été publié le 25 juin 2016 dans les pages russes du site Katehon.ru. Il s’agit d’un éclairage projeté sur le lien qui unit l’Empire Romain d’Orient, Constantinople-Nouvelle Rome, et la Russie, dans laquelle les éléments de l’histoire se conjuguent à la philosophie, la géopolitique et la spiritualité.

Parler de Byzance sans respect
Signifie signer à l’encre de l’ignorance.
A.S. Khomiakov

 

Écrire à propos de Byzance est chose malaisée. Voilà plus de cinq siècles que disparut de la carte du monde politique cet empire brillant et à la longévité la plus importante de toute l’histoire de l’humanité. Il semble qu’il fut dès l’origine impossible de débattre à son sujet sinon de façon objective, du moins sans que la passion ne s’en mêlât. Mais Byzance signifie souffrance, sang versé, et tant nous-mêmes, qui nous disons ses héritiers, que l’Occident, portons une lourde part de responsabilité dans sa chute.
Dans le destin de Byzance plane un certain inachèvement, lié pas tant à la ligne des événements qui s’interrompit en 1453, qu’à l’inachèvement d’une mission politique et spirituelle, et à l’inachèvement (pas encore tout à fait) de l’histoire humaine en général. Les caractéristiques de la structure interne de l’Empire Romain d’Orient (qui justifieraient d’un point de vue strictement juridique le recours à l’appellation de ‘Byzance’) et les défis qu’elle eut à relever, offrent un tel écho aux questions qui se posent aux dirigeants contemporains que tout débat à propos d’un de ses aspects prend immédiatement une teinte passionnée et finit par se transformer en débat d’idéologique sur le Bien et le Mal.

palaiologos_dynasty_emblemLe novice qui se met à l’étude de Byzance est plongé dans l’atmosphère des conspirations scientifiques et politico-sociales contre l’empire orthodoxe. Dans le discours occidental contemporain dominant elle était présentée jusqu’il y a peu comme «perfide», «despotique», «totalitaire», «bureaucratisée» et «arriérée». Pareilles invectives surprendraient probablement les Romains eux-mêmes (c’est ainsi que les ‘Byzantins’ se nommaient), aux yeux desquels l’Europe demeura longtemps une périphérie peuplée de peuples barbares demi-sauvages et qui après le schisme de 1054 plongèrent dans les ténèbres de l’hérésie.
A notre avis, la plupart des accusations précitées peuvent aisément être réfutées, simplement en observant d’un peu plus prêt la vie sociale, politique et spirituelle de l’Empire Romain d’Orient. Une telle démarche n’est toutefois pas du tout évidente pour l’Occident dont l’aversion envers Byzance repose sur un complexe intriqué de raisons d’ordres psychologique, politique, historique et de valeurs, accentuées par le racisme profond de nos voisins européens «éclairés par les Lumières» (ne faudrait-il pas écrire «illuminés»?).
A la continuité plus que millénaire du pouvoir impérial dans l’Empire Romain d’Orient s’oppose 1romeoskataphraktostoute l’expérience historique de ce qui forme aujourd’hui l’Europe de l’Ouest, dans laquelle s’enchainèrent dans un rapide mouvement kaléidoscopique les guerres civiles, les invasions et les guerres entre toutes sortes de principautés, duchés et royaumes. En conséquence naquit le mythe d’un pouvoir byzantin «fourbe», se maintenant sur le trône par la subornation, le chantage et le meurtre, de même qu’une politique extérieure agressive mais lâche. (En Occident, avant l’invention du concept de «droits de l’homme», on recourait à une instrumentation absolument analogue, mais avec beaucoup moins d’élégance et d’efficacité). De même, l’administration centralisée d’un immense territoire paraît injustifiée à ceux qui sortent du système féodal, avec sa célèbre formule : «le vassal de mon vassal n’est pas mon vassal». De leur point de vue, il s’agit de ‘despotisme’ et d’un ‘déchaînement de bureaucratie’. (Nous ne contestons pas le fait que la direction d’une quelconque ville médiévale européenne, même les plus grandes, dont la population s’élevait à quelques milliers d’habitants était possible sans déployer un appareil bureaucratique très sophistiqué, mais comment résoudre des situations similaires quand il s’agit d’un État comptant plusieurs millions de citoyens?) La symphonie des pouvoirs de l’État et de l’Église semble inconcevable dans le contexte des incessantes querelles entre les États européens et le Pape, auxquelles vint s’ajouter la sécularisation continue de la foi, et cette symphonie fait fonction de «preuve» du totalitarisme de l’Empire Romain d’Orient, privant soi-disant l’homme de toute liberté individuelle et de tout espace privé.

Il convient d’accorder ici toute l’attention requise à la différence fondamentale entre Byzance et l’Occident, qui réside dans la spécificité respective de leurs perceptions du monde, de leurs acceptions différentes de l’espace qui les entoure, et du temps. La formation du modèle occidental de ‘l’universum’ remonte pour l’essentiel à l’époque des ‘Lumières’ et au contexte de l’idéologie positiviste, fondée sur le primat des liens de cause à effet, et tournée vers la mécanique du ‘phénomène’. De ce point de vue, le centre du monde ce n’est pas seulement l’homme, mais l’objet, et ce qui ne peut être décrit comme objet, comme fondement matériel, ne peut être objet de l’étude scientifique, et par conséquent, celle-ci ne peut s’intéresser à cette dernière. La Byzance orthodoxe, Pantocrator Agia Sophiaau contraire regardait le monde matériel, quotidien seulement comme une image d’un autre monde, transcendant, invisible ; en outre, il ne s’agissait pas là d’un exercice scolastique de théologien, mais de la perception réelle des gens ordinaires, guerriers, paysans, artisans, marchands. Comme le note le byzantiniste russe A.Lidov, «Il s’agit d’une acception tout à fait particulière, ‘iconique’ du monde, celui-ci étant perçu non pas comme la réalité ultime, définitive (qui peut être décrite, disséquée, classifiée, rien n’existant mis à part elle), mais comme l’image d’un autre monde. Et ceci ne se circonscrit pas à la sphère de l’Orthodoxie et du sacré. C’est ancré dans la conscience».
En d’autre mots, si pour les Byzantins, la question déterminante de l’existence est ‘pourquoi’ dans le sens de «pour quoi faire» (et pas du tout dans le sens «à cause de quoi», pourquoi apparaît et existe cette chose ou cette autre, pourquoi l’homme vit-il et meurt-il), du point de vue des Occidentaux vivant dans un monde uniformisé où rien sinon eux-mêmes ne peut-être revêtir la qualité d’objet, la situation est tout à fait inversée. La question «pour quoi faire ?» est perçue comme hostile et portant atteinte à la liberté personnelle de celui à qui elle est adressée, et toute civilisation au fondement téléologique, comme l’était l’Empire Romain d’Orient, est étiquetée comme ‘totalitaire’ (Voir par exemple le livre largement connu de K. Popper «La Société ouverte et ses ennemis»).
La haine de l’Occident à l’égard de Byzance, c’est la haine de l’usurpateur et du voleur pour leur victime. Longtemps avant le pillage des richesses de Constantinople en 1204 par les Croisés, les princes européens commencèrent par usurper un des trésors les plus précieux de leur voisin oriental : le titre d’empereur. Après la division définitive, en 395, de l’Empire Romain unifié en un Empire d’Orient et un autre d’Occident, ce dernier cessa très rapidement d’exister et celui d’Orient demeura pendant un millénaire le seul continuateur direct de la «Première Rome».
En 476, Odoacre, chef des mercenaires germains, renversa le dernier empereur «occidental», Romulus Augustule et fut, avec l’aval du Sénat, proclamé ‘Roi’ d’Italie, et il fut reconnu en cette qualité par Byzance. Et en lieu et place de l’Empire Romain d’Occident émergèrent une série de petites entités politiques barbares : en Italie s’installèrent les Ostrogoths, dans le Sud-est de la Gaule et en Espagne, les Wisigoths, au Nord-Ouest de la Gaule, les Francs, dans le Nord de l’Afrique, les Vandales, dans les îles britanniques, les Angles et les Saxons. Pendant un période relativement longue, les chefs de ces tribus et peuples furent absorbés dans des luttes de pouvoir et autour de la maîtrise des territoires, se satisfaisant des rangs de prince ou de roi. Mais au fur et à mesure de l’apparition en Occident d’États relativement grands et centralisés, les prétentions à la couronne d’empereur romain se mirent à résonner de plus en plus distinctement. Le trône papal les accueillit en général de façon assez positive ; il n’avait alors pas encore rompu les liens de communauté avec le Impératrice IrènePatriarcat de Constantinople, mais s’efforçait par tous les moyens d’affirmer sa prééminence dans le monde chrétien. En l’an 800, le Pape Léon III, en l’absence de tout fondement juridique ou canonique et faisant fi de l’autorité de l’impératrice Irène régnant à Constantinople, couronna le roi franc Charles le Grand en qualité d’empereur. Il est tout à fait caractéristique que les héritiers de Charles ne tentèrent en rien de préserver cet «empire romain». Il fut divisé en trois morceaux au profit de ses petits-fils : les Royaumes francs oriental et occidental et la Lotharingie, qui plus tard devinrent la France et l’Allemagne.
En 962, Othon Ier, de dynastie saxonne, fut couronné, de façon tout aussi arbitraire que Charles, empereur du «Saint Empire romain de la Nation Germanique». Celui-ci survécut jusqu’en 1806, connaissant une longévité supérieure à celle des morceaux d’empires de Francs, mais les terres germaniques ne disposaient pas d’un noyau autour duquel eût pu se construire un Etat impérial solide, cohérent et efficace. Il suffit de faire remarquer que sur le territoire de « l’empire » existaient plus de 300 petites formations étatiques. «L’empereur» ne disposait pas d’un ‘budget d’empire’, ni encore de tribunaux d’empire, et lors des conflits, il dépendait du soutien des monarques germains et des villes.

A cette époque déjà, les monarques d’Europe occidentales se préoccupaient avec acharnement à conférer un caractère légal et légitime à leurs prétentions à l’héritage romain. Et sur ce genre de fondement, profitant de prétextes divers, ils déclaraient le pouvoir impérial de Constantinople «factice» et «illégal», jugeant, par exemple, impossible qu’une femme puisse accéder au trône, alors que c’était chose tout à fait normale pour Byzance, compte tenu de sa vénération particulière pour la Panagia GrèceTheotokos. Avec la disparition de l’Empire Romain d’Orient et l’élévation progressive du niveau des technologies et de l’économie de l’Occident, les attaques ne ralentirent pas ; elles se firent de plus en plus violentes, comme si de cela aurait dépendu la solidité du fondement du pouvoir en Europe. C’est à cette époque que Moscou devint l’objet de critiques et diffamation, elle qui avait pris sur soi la mission spirituelle de «Troisième Rome». On constate avec intérêt que l’expert politique américain Edward Luttwak (Il fait partie de la poignée de ceux qui en Occident ont tendance à considérer Byzance comme un État qui fut très efficace), dans son livre «Stratégie de l’Empire byzantin» donne clairement à comprendre que l’existence de l’empire se termina lors de la prise de Constantinople par les Croisés. L’entité étatique qui apparut à sa place et dura quelque décennies se nommait elle-même «empire». Mais il ne s’agissait que d’une sorte de grand royaume grec. Mais cette situation eut pour résultat de saper peu à peu le lien entre Constantinople (la «Nouvelle Rome») et Moscou, qui entretenait dès lors des relations non pas avec les empereurs romains mais seulement avec des rois grecs. Ce point de vue ne correspond évidemment pas avec l’expérience historique et la vision du monde de la Russie. En principe, la conception qu’entretenait la Rus’ d’elle-même, en tant qu’unique protectrice au monde de la foi orthodoxe remontait plus loin que la formation officielle du concept de ’Moscou-Troisième Rome’, plus loin même que l’écrasement de Constantinople par les Turcs. Elle datait en fait du moment où fut conclue l’union de Florence, en 1439 selon laquelle l’empereur byzantin et une partie du clergé byzantin admirent la primauté papale en les matières ecclésiastiques. Dès lors, pour nos ancêtres, le sort de la «Nouvelle Rome » était scellé. Juridiquement, 2223_sofia-paleologle «transfert de l’Empire» fut consolidé en 1472, avec le mariage de Sophie Paléologue, nièce du dernier empereur Byzantin, et Ivan III Vassilievitch, Grand Prince de Moscou. Le starets Philothée du Monastère Saint Éléazar de Pskov écrivit une lettre au Grand Prince de Moscou Vassili III Ivanovitch, plaidant en soutien des requêtes spirituelle et politique du gouvernement et du peuple : «Sache, toi qui aime Dieu, toi qui aime le Christ, que tous les royaumes chrétiens sont arrivés à leur terme ; ils se sont assemblés au royaume de notre souverain, conformément aux prophéties, c’est à dire au royaume romain ; car deux Romes sont tombées mais la troisième tient bon, et de quatrième il n’y en aura point». C’est pourquoi Byzance a toujours existé de façon explicite, ou invisiblement, dans la vie politique, sociale et culturelle de la Russie. Il suffit de se souvenir du «Projet Grec» de Catherine II, des guerres russo-turques des XVIIIe et XIXe siècles, du style architectural néobyzantin (Par exemple, le tracé de la Cathédrale Saint Nicolas de la Mer à Kronstadt reproduit celui de Saint Sophie de Constantinople), des œuvres de Konstantin Leontiev, de celles de Théodore Tioutchev, des vers de Maximilien Volochine… Mais en 1917, l’Empire de Russie fut détruit et le thème de Byzance disparut pour longtemps du discours officiel. Dans la Russie contemporaine, l’Empire Romain d’Orient continue à notre avis à être la victime d’une conspiration du silence et de l’ignorance. Il est incontestable que nous avons de remarquables byzantinistes, tels que A.M. Lidov ou S.A. Ivanov, mais leurs travaux ne sont connus qu’au sein des milieux académiques. On n’enseigne quasiment jamais l’histoire de Byzance dans les écoles secondaires et supérieures. Évidemment! L’essentiel du temps est perdu dans l’étude de l’Europe médiévale ; de tous ces petits princes et roitelets si importants pour la compréhension de la mission de la Russie ! Et la littérature que l’on trouve sur les rayons des bibliothèques scolaires est constituée soit de traductions, soit d’ouvrages datant d’avant la révolution (Et ceci, en dépit de ce qu’en Europe même, des rayonnages entiers sont consacrés à notre sujet). Ces derniers temps, toutefois, l’intérêt pour Byzance a commencé à croître progressivement. Mais il se limite en partie à une réflexion portant sur l’éventuelle «culpabilité de Byzance dans notre misérable destin totalitaire», ou à la «participation de Byzance à notre grandeur».
Vizantiiski UrokUn des meilleurs ouvrages concernant Byzance, conçu pour une large audience, est le film publiciste que réalisa l’Archimandrite Tikhon (Chevkhounov) «La Chute de l’Empire. Leçon byzantine». (2008) On y explique de façon très claire où le pouvoir romain alla puiser les forces nécessaires pour résister aux circonstances vraiment extrêmes dans lesquelles il exista pendant son histoire plus que millénaire et pourquoi, il finit tout de même par s’effondrer. Parmi les raisons essentielles de cette issue sont mentionnées les machinations des dirigeants européens qui se terminèrent en fin de compte par une agression directe contre Constantinople, renforcée par l’intervention de l’oligarchie locale et au capital financier international auquel cette dernière était intimement liée, et représenté à cette époque par les République italiennes, Venise et Gênes, renforcée également par la croissance du nationalisme grec parmi l’aristocratie et l’intelligentsia byzantine, qui «soudain» se souvenaient qu’ils n’étaient pas romains, mais ‘hellènes’, terme considéré jusque là comme injurieux et réservé aux grecs non-chrétiens. Mais ce qui, au-delà de tout, a tué Byzance, c’est la perte de sa foi véritable, qui se manifesta en particulier à travers plusieurs unions avec les Catholiques de Rome, aux conditions établies par le Pape. De plus, si en 1274, l’union de Lyon résultat des efforts personnel de l’empereur Michael VIII Paléologue (ce pourquoi il fut excommunié et privé de funérailles d’Église), en 1439, l’union de Florence fut en revanche largement défendue non seulement par l’élite politique byzantine, mais aussi par une partie non négligeable des hiérarques. Et à cela venait s’ajouter les avances humiliantes des Turcs qui se faisaient de plus en plus pressants et qui convainquirent finalement le peuple qu’il était trahi par le pouvoir, tant civil que religieux, ce qui donna naissance dans la société à une atmosphère de profonde apathie et de déliquescence. En d’autres mots, Byzance cessa d’être le Royaume de Dieu sur terre et dédaigna le rôle, qui lui avait été assigné par Dieu, de katekhon, de celui qui ‘barre la route au mal’, ce que l’eschatologie orthodoxe conçoit comme le principe qui empêche l’arrivée des derniers jours du monde et celle de l’Antichrist. Elle avait vidé la coupe de la patience divine, et elle tomba sous la pression de la ruée des barbares, qu’elle était parvenue à contenir pendant des siècles.
L’empire mourut, corps, et, ce qui est plus important, âme. Il est d’autant plus étrange de lire un traité anonyme du XIVe siècle à propos des rangs et fonctions à la cour, décrivant en détail les robes somptueuses des dignitaires, leurs chapeaux et chaussures variés, marquant les différences de rang. Le traité décrit le déroulement des cérémonies de la cour, couronnements, promotions aux rangs de dignité successifs, etc. En d’autres mots, ce traité fait double emploi avec le recueil du Xe siècle «A propos des Cérémonies». Au Xe siècle, au temps de la splendeur éclatante et de la puissance de l’empire, de telles instructions étaient compréhensibles, et nécessaires. Mais la parution d’un traité similaire au XIVe siècle, à la veille de la chute de l’État, qui déjà paraissait inévitable à beaucoup, induit une perplexité et une sensation effrayantes face à un tel aveuglement qui manifestement régnait à la cour des Basileus byzantins de la dernière dynastie. Le célèbre byzantiniste allemand K.Krumbacher, perplexe lui-aussi devant la parution de ce traité au XIVe siècle, faisait remarquer que «La réponse se trouve peut-être dans un proverbe grec du Moyen-âge, disant : ‘Le Monde s’est effondré, mais mon épouse a revêtu ses plus beaux atours’.»

La relation entre la Russie contemporaine et Byzance est malsaine. Sur un plan strictement juridique, suite à la chute de l’Empire de Russie, Moscou a perdu le droit à l’héritage byzantin. Dès lors, en nous proclamant la «Troisième Rome», nous nous conduisons comme des imposteurs, à l’image des Occidentaux. Mais d’un autre côté, les États-Unis et l’Europe, avec leur ultraindividualisme, leur culte du veau d’or, érigeant le péché en vertu et mettant sur un même pied d’égalité le Bien et le Mal préparent déjà ouvertement la venue au monde du faux-prophète, et en réalité, le seul obstacle réel – katekhon – sur leur route, c’est la Russie. C’est précisément en cette qualité qu’elle suscite la fureur la plus déchaînée des occidentaux (apposant sur le concept de «Moscou Troisième Rome» l’étiquette de projet incontestablement fasciste et vecteur de haine envers l’homme) et en même temps attire les regards remplis d’espoir de tout le reste du monde, non-occidental, ce dont témoignent, par exemple, une longue série de prophéties grecques, proche-orientales et même latino-américaines.
Double drapeauL’avenir répondra à la question de savoir si nous sommes ou non les héritiers de l’Empire Romain d’Orient. Cela nous place dans une situation de risque limité. Mais l’inaction face aux Ténèbres qui avancent de l’Atlantique devient de plus en plus dangereuse. Nous ne devons pas nous laisser tenter par les séductions de l’Occident. Nous devons conserver la pureté de notre foi et la Tradition de nos ancêtres orthodoxes ; alors, avec l’aide de Dieu, nous retarderons l’arrivée des temps derniers, comme le fit Byzance pendant des siècles. Si nous méprisons cette mission (fût-ce par inadvertance, crainte ou trahison), nous chuterons, comme le fit Constantinople, «la Nouvelle Rome». Et alors, rien ni personne ne préservera le monde de sa Fin.
Tôt ou tard, l’Antichrist viendra. Mais malheur à ceux par lesquels il viendra.

Traduit du russe.

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